🐈 Affiche Mai 68 Sois Jeune Et Tais Toi Analyse

taistoi sil te plait . RĂ©pondre + 0-0 Et macky Ă©tait toujours 3 eme. Le vol ne passera pas, votre jeu est stupide mais les SĂ©nĂ©galais sont aux aguets gare Ă  vous. RĂ©pondre + 10-0 Le Monde 2 Le 22 mars [1998], Me LeliĂšvre dispersait Ă  Chartres une collection de quelque 150 affiches originales nĂ©es en mai 68 Ă  l'Ecole des beaux-arts. Le 22 mars [1998], Me LeliĂšvre dispersait Ă  Chartres une collection de quelque 150 affiches originales nĂ©es en mai 68 Ă  l'Ecole des beaux-arts. Trente ans plus tard, les slogans-chocs d'un printemps chaud ressurgissent en vente publique, mais les prix restent encore dĂ©mocratiques. Les nostalgiques et les curieux qui auraient manquĂ© la dispersion de Chartres pourront se rendre Ă  Drouot le 29 avril une autre vente d'affiches de Mai y sera organisĂ©e. L'anniversaire Ă©tait donc cĂ©lĂ©brĂ© en avant-premiĂšre Ă  Chartres Me LeliĂšvre dispersait le 22 mars une collection d'affiches originales illustrant au jour le jour les Ă©vĂ©nements de Mai. Le hasard fait parfois bien les choses, la date choisie tombait Ă  pic. C'est en effet le 22 mars 1968 qu'un petit groupe d'Ă©tudiants, menĂ© par Daniel Cohn-Bendit, commence Ă  faire parler de lui dans " Nanterre-la-folle ". L'amorce d'un printemps chaud, oĂč il devient tout-Ă -coup urgent de " changer la vie " et d'imaginer " Sous les pavĂ©s, la plage ! ". Les quelque 150 affiches originales mises en vente provenaient de " l'Atelier populaire de l'ex-Ecole des beaux-arts ", selon la terminologie en vigueur Ă  l'Ă©poque. L'ensemble constituait la collection d'un ancien acteur des Ă©vĂ©nements. Celui-ci, chargĂ© de collecter les affiches aux Beaux-Arts et de les distribuer dans les comitĂ©s, avait gardĂ© ses prĂ©fĂ©rĂ©es, faisant ainsi office de conservateur. Ces piĂšces n'avaient donc jamais Ă©tĂ© collĂ©es. Ce qui explique qu'elles soient restĂ©es en bon Ă©tat. Un point important, car ces affiches de Mai sont particuliĂšrement fragiles. Presque toujours tirĂ©es en sĂ©rigraphie, procĂ©dĂ© peu coĂ»teux, sur des supports de qualitĂ© mĂ©diocre, elles n'avaient Ă  l'Ă©vidence guĂšre Ă©tĂ© conçues pour durer. Cette Ă©conomie de moyens s'accorde tout-Ă -fait avec le cĂŽtĂ© brut des slogans-chocs, relevĂ©s d'images coups de poing traitĂ©es en aplats de couleurs vives. L'actualitĂ© y est rĂ©sumĂ©e Ă  chaud, sans recul ni subtilitĂ©s hors de saison. Agressif, le graphisme va Ă  l'essentiel. Ainsi, " La police s'affiche aux Beaux-Arts, les Beaux-Arts affichent dans la rue ", proclame l'Atelier populaire sur une sĂ©rigraphie envahie d'une monstrueuse tĂȘte de CRS armĂ©e d'un pinceau entre les dents 3 600 francs. Si quelques-unes de ces affiches paraissent avoir assez mal vieilli, d'autres, en revanche, frappent par leur caractĂšre prĂ©monitoire. Comme celles traitant du chĂŽmage. L'une d'elles reprĂ©sente un nourrisson serrĂ© dans ses langes, avec cette question " Sera-t-il chĂŽmeur ? " 750 francs. " CHIENLIT " Parmi les cibles prĂ©fĂ©rĂ©es des affichistes de Mai, le gĂ©nĂ©ral de Gaulle figure en bonne place. BrossĂ©e de façon grand nez, kĂ©pi, oreilles dĂ©mesurĂ©es, sa silhouette caractĂ©ristique se trouve accommodĂ©e Ă  toutes les sauces. " Sois jeune et tais-toi ", Ă©nonce l'une de ces affiches. De Gaulle, de profil en ombre chinoise, massif, immense, pose sa main devant la bouche d'un jeune homme 2 100 francs. Encore et toujours le GenĂ©ral, silhouette Ă  la place de la croix de Lorraine, sur une sĂ©rigraphie titrĂ©e " Renversons sa dictature " 400 francs, ou reprĂ©sentĂ© de profil les bras levĂ©s, avec ce commentaire sans appel " La chienlit, c'est lui ! " 600 francs. D'autres lĂ©gendes sonnent de façon autrement inquiĂ©tante. Comme celle qui assimile de Gaulle Ă  Hitler. Le dessin, rĂ©solument expressionniste, en rĂ©fĂ©rence aux annĂ©es 30, montre six tĂȘtes de rĂ©actionnaires, en rouge sur fond blanc, surmontĂ©es de ce credo cinglant " Notre seul espoir Hitler barrĂ© De Gaulle " 2 000 francs. MĂȘme esprit pour " Parti unique. Dictature ", qui comporte le sigle gaulliste dans lequel s'inscrit la croix gammĂ©e 400 francs. La presse n'est pas non plus en odeur de saintetĂ©. Citons notamment " Les rĂ©dactions Ă  dĂ©sinfecter " 1 600 francs ; " La police Ă  l'ORTF c'est la police chez vous ", avec les anneaux du sigle de l'ORTF hĂ©rissĂ©s de fil de fer barbelĂ© 1 100 francs, ou encore " Le rĂ©gime compresse, la presse complice ", reprĂ©sentant un personnage Ă©crasĂ© sous une presse. Cette derniĂšre sĂ©rigraphie, attribuĂ©e Ă  l'Ecole supĂ©rieure d'architecture, fait ressortir de façon appuyĂ©e les doubles " s " des mots " compresse " et " presse " 850 francs. TraitĂ©es de façon tout aussi fĂ©roce, les Ă©lections de juin 68 ont inspirĂ© quelques images fortes. Exemple " Voter, c'est mourir un peu ". L'urne a pris la forme d'un cercueil, marquĂ© d'une croix de Lorraine 1 100 francs. MĂȘme veine pour " AdhĂ©rez au parti de la trouille " l'injonction s'accompagne d'un dessin tremblotant de la croix de Lorraine, inscrite dans un " V " tracĂ© d'une main tout aussi peureuse 450 francs. AprĂšs cette flambĂ©e porteuse d'espoirs, le retour au calme qui s'amorce n'est pas vraiment du goĂ»t des activistes de Mai. Des affiches plus tardives illustrent ces lendemains dĂ©chantĂ©s. Ainsi, " 14 juillet 68, la France embastillĂ©e " dĂ©crit un Hexagone embarbelĂ©, occupĂ© par un Ă©norme CRS casquĂ©, menaçant, matraque au poing, sur fond de lampions dĂ©risoires 1 200 francs. TrĂšs rĂ©ussie graphiquement, une autre sĂ©rigraphie met en scĂšne un vaste troupeau de moutons, pressĂ©s les uns contre les autres, en foule, avec ce long commentaire en forme de conclusion dĂ©sabusĂ©e " Retour Ă  la normale. Que se passe-t-il ? Il ne se passe rien. Que s'est-il passĂ© ? Il ne s'est rien passĂ©. Pourtant... j'avais cru comprendre. Il ne faut pas comprendre " 3 000 francs. En fin de compte, presque toutes ces affiches ont trouvĂ© preneur dans la fourchette des estimations. Raisonnables, celles-ci s'Ă©chelonnaient entre 200 francs et 2 000 francs. La plus haute enchĂšre 6 300 francs allait au trop fameux " CRS SS ". NoĂ«lle Joly Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil Ă  la fois Ce message s’affichera sur l’autre appareil. DĂ©couvrir les offres multicomptes Parce qu’une autre personne ou vous est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil. Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil Ă  la fois ordinateur, tĂ©lĂ©phone ou tablette. Comment ne plus voir ce message ? En cliquant sur » et en vous assurant que vous ĂȘtes la seule personne Ă  consulter Le Monde avec ce compte. Que se passera-t-il si vous continuez Ă  lire ici ? Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connectĂ© avec ce compte. Y a-t-il d’autres limites ? Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant Ă  des moments diffĂ©rents. Vous ignorez qui est l’autre personne ? Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe. Lerapprochement de ces trois documents illustre la crise de sociĂ©tĂ© que vit la France en mai 1968 : les jeunes hommes et les jeunes femmes remettent en cause une sociĂ©tĂ© contrĂŽlĂ©e par un pouvoir moralisateur (chrĂ©tien), pudibond et liberticide. Les mĂ©dias sont accusĂ©s d’ĂȘtre des courroies de transmission du pouvoir bourgeois en place. Immigration le miracle est possible En couverture - Immigration, la mĂ©thode danoise Politique - Macron, le PrĂ©sident presse-citron France - La France rurale, le vrai dĂ©sert administratif SociĂ©tĂ© - CrĂšches l'enfer du dĂ©cor Économie - Cinq milliards de watts sous la mer Culture - Jules-EugĂšne Lenepveu, hĂ©ritier de la grande mariniĂšre Histoire - Une fin de rĂšgne sans fin Art de vivre - Les Hautes Mers, Ă©chappĂ©e loin de la terre L'incorrect - RĂ©my Prud'homme sur la bonen excuse du climat pour dĂ©penser toujours plus Lire le numĂ©roDĂ©couvrir nos offres d'abonnement
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Savoiture Ă©tait en panne mais il n'Ă©tait qu'Ă  une grosse trentaine de minutes de chez lui. Cela faisait dix minutes Ă  peu prĂšs qu'il marchait. Marcher ne le gĂȘnait pas. Paris, de nuit, c'Ă©tait calme, beau ; quelques cris de jeunes fĂȘtards bourrĂ©s mais rien de bien mĂ©chant ni de dangereux. De toute façon, il savait se dĂ©fendre ! Document 1Affiche Ă©tudiante "Sois jeune et tais-toi" Charles Perussaux & BibliothĂšque nationale Paris via Wikimedia Commons Document 2Affiche Ă©tudiante "La police vous parle tous les soirs Ă  20h" Charles Perussaux & BibliothĂšque nationale Paris via Wikimedia CommonsSĂ©lectionner le groupe qui dĂ©bute le mouvement social de mai Ă©tudiantsLes ouvriersLes chĂŽmeursLes patronsLe document 1 montre deux personnages, relier chacun de ces personnages Ă  sa jeuneLe gĂ©nĂ©ral de GaullePersonnage en blancPersonnage en noirSĂ©lectionner les Ă©lĂ©ments permettant de dĂ©crire le document personnage est un personnage est un personnage est une parle Ă  la fait du enregistre une chacun des documents au thĂšme 1Document 2Le manque de libertĂ© d'expression pour la contrĂŽle du pouvoir sur les mĂ©dias.
Quelquesrappels Ă  propos des BDGest'Arts. Du 16/12/2021 au 03/01/2022, organisĂ© ses traditionnels BDGest’Arts. Pour la 19e annĂ©e consĂ©cutive, les habituĂ©s du site (190.000 inscrits en dĂ©cembre 2021) Ă©taient invitĂ©s Ă  Ă©lire leurs favoris dans 7 catĂ©gories. .
A l’occasion du cinquantenaire de Mai 1968, les Archives dĂ©partementales des Landes souhaitent faire partager un ensemble de documents iconographiques relatifs Ă  cet Ă©vĂ©nement oĂč l’imagination fut au pouvoir» et oĂč la crĂ©ation fut l’engagement d’un groupe, le rĂ©sultat d’un acte collectif. La mĂ©moire collective de Mai 68 est largement liĂ©e aux affiches produites par l’École des Beaux-Arts de Paris rebaptisĂ©e l’Atelier populaire Ă  partir du 14 mai par ses Ă©tudiants et ses enseignants. Les Ă©tudiants des Beaux-Arts Ă©taient sollicitĂ©s par des manifestants, grĂ©vistes et contestataires venus de la France entiĂšre pour leur commander des affiches. Chaque soir, un comitĂ© validait les sujets, slogans et graphismes, imprimĂ©s ensuite dans la nuit. AprĂšs une intense pĂ©riode d’activitĂ©, l’Atelier populaire est contraint de fermer ses portes. Le 27 juin, vers 4 heures du matin, les gardes mobiles occupent l’École des Beaux-Arts ; l’Atelier populaire est fermĂ© Ă  5 heures. Une derniĂšre affiche verra le jour dans la foulĂ©e elle dĂ©clare La police s’affiche aux Beaux-Arts, les Beaux-Arts affichent dans la rue». Les affiches de Mai 68 sont caractĂ©risĂ©es par de larges aplats noirs et rouges, comme dans un pochoir. Cet effet est dĂ» Ă  la technique utilisĂ©e la sĂ©rigraphie. Rapide et souple, elle a pu permettre de tirer jusqu’à 2000 affiches par jour. Ces sĂ©rigraphies sont le reflet de la rencontre de l'art et de la politique et tĂ©moignent des grandes Ă©volutions sociales et culturelles. Cette collection de dix-neuf affiches, conservĂ©e dans les fonds des Archives dĂ©partementales, a Ă©tĂ© rassemblĂ©e au cours de diffĂ©rents achats rĂ©alisĂ©s par le DĂ©partement des Landes en 2008.
Le15 septembre 2020 Ă  23:45:44 Malaxeur2Boobs a Ă© - page 6 - Topic [HS] 68% des espĂšces animales ont disparues. du 15-09-2020 22:43:10 sur les forums de Retour Jeux Mai 68, dĂ©but d’une lutte prolongĂ©e », Travailler maintenant, c’est travailler avec un pistolet dans le dos », Sois jeune et tais toi », Nous sommes tous des juifs allemands »...Les slogans de Mai 68 ne manquant ni de force, ni de panache. Ils s’attaquent au pouvoir en place personnalisĂ© par de Gaulle, Ă  la tĂ©lĂ©vision publique, aux forces de l’ordre, et appellent les ouvriers et les paysans Ă  se rassembler. Lepetit patient, dont l’identitĂ© et le sexe n’ont pas Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©s, Ă©tait suivi Ă  Soweto dans le cadre d’un essai clinique menĂ© de 2005 Ă  2011 par les Dr Avy Violari et Mark Cotton. Celui-ci avait pour but d’évaluer la meilleure utilisation possible des traitements anti-VIH qui venaient tout juste d’arriver en Afrique du Sud . 20 mars 2010 6 20 /03 /mars /2010 1617 Belle affluence au Forum des Images du 11 au 14 mars oĂč la manifestation Je suis une femmes pourquoi pas vous ? » a Ă©tĂ© suivie avec enthousiasme. On nous dit qu’on s’est bousculĂ© Ă  la soirĂ©e des Archives des luttes » le 12 et que le colloque Quand les femmes s’emparent de la camĂ©ra » le 13 a soulevĂ© de passionnantes questions. Ci-dessous, en attendant d’autres transcriptions, l’intervention de Cathy Bernheim Ă  la table ronde FĂ©minisme, genre et reprĂ©sentation », Ă  laquelle participaient Heike Hurst, GĂ©raldine Gourbe, Marie-HĂ©lĂšne Bourcier, Claudine Le Pallec Marand, Nicole FernĂ ndez Ferrer et Laetitia Puertas. ‱ Au cinĂ©ma l’Archipel, le film de Charlotte Silvera, “Louise l’insoumise“ nous a entraĂźnĂ©es avec tendresse et simplicitĂ© dans ces Ă©poques de l’enfance oĂč il faut dĂ©fendre l’intĂ©gritĂ© de son identitĂ© pour devenir une femme. DĂ©gagĂ© de tout maniĂ©risme, un film subtilement moderne qui se positionne dans l’histoire du cinĂ©ma et prend le parti du fĂ©minisme, d’un bout Ă  l’autre, sans concessions. Louise l’insoumise est disponible en vidĂ©o, ainsi que deux des autres films de Charlotte Silvera, Ă  l’adresse suivante Il faut dire que ce soir lĂ , Dominique Poggi nous avait ouvert les sens par le souffle de sa musique descendue d’un temps oĂč les quatre Ă©lĂ©ments jouaient avec le monde dans un jazz universel. ‱ A la Mairie du 20° et jusqu'au 25 mars, l’exposition des affiches du mouvement organisĂ©e par les Archives fĂ©ministes et lesbiennes est toujours visible Ă  la Mairie du 20° arrondissement parisien. ‱ Le Festival International de Films de Femmes du 2 au 11 avril Ă  la Maison des Arts de CrĂ©teil, Nous reparlerons de ce rendez-vous, incontournable depuis 1979, trĂšs prochainement et plus en dĂ©tail. Mais dĂ©jĂ  le calendrier FESTIVAL INTERNATIONAL DE FILMS DE FEMMES - CRÉTEIL FESTIVAL INTERNATIONAL DE FILMS DE FEMMES - CRÉTEIL ‱ Intervention Ă  la table ronde “FĂ©minisme, genre et reprĂ©sentation“ au Forum des Images BELLES ET REBELLES À PERPÉTUITÉ ? Intervention de Cathy Bernheim au colloque Quand les femmes s’emparent de la camĂ©ra » Forum des Images, Paris, 13 mars 2010 Quand j’étais petite, j’ai passĂ© quelques dĂ©buts de vacances dans un HLM de la citĂ© Lamalgue Ă  Toulon. Ma mĂšre m’y dĂ©posait avec une dĂ©capotable qui faisait son effet au pied du bĂątiment B oĂč habitait sa sƓur aĂźnĂ©e, mĂšre de sept enfants dont trois Ă  peu prĂšs de mon Ăąge vivaient encore Ă  la maison. Cette arrivĂ©e avait du style elle Ă©tait trĂšs cinĂ©matographique, ma mĂšre, trĂšs cinĂ©. Elle s’était fait un look de Lana Turner quelques annĂ©es aprĂšs ma naissance et n’avait de cesse que je lui ressemble aussi. Ce qui m’a valu quelques sĂ©ances de torture esthĂ©tique auxquelles j’ai rĂ©sistĂ© vous voyez comment. Moi, celle Ă  qui j’aurais voulu ressembler, c’est Ava Gardner. Surtout dans La comtesse aux pieds nus », quand elle baladait ce pauvre Humphrey Bogart sous la pluie dans les ruelles de Madrid et l’abandonnait pour des petits machos dont je me demandais toujours ce qu’ils avaient de si attirant pour elle. J’étais jeune je ne savais pas encore. Mais je savais qu’Ava Gardner Ă©tait belle et je savais deux choses indiscutables. Que 1. Pour ĂȘtre belle il faut souffrir ». Et que 2. Sois belle et tais-toi ». Ma trĂšs cinĂ©matographique maman repartait dans un nuage de poussiĂšre enfin, lĂ , j’en rajoute on n’est quand mĂȘme pas dans un western. Et moi je restais lĂ , sur le balcon, soulagĂ©e de la voir partir si joyeuse, tandis qu’entourĂ©e de mes cousins et cousines qui n’allaient jamais au cinĂ©ma j’allais enfin pouvoir ĂȘtre moche et dĂ©braillĂ©e. Maman adorait le cinĂ©ma. Elle Ă©tait nĂ©e dans un film de Pagnol, Ă  Marseille, et m’avait mise au monde dans un film d’Hollywood, sur la Riviera. Le dernier film que j’ai vu en salle avec elle s’appelait Imitation of Life » Le mirage de la vie ». Je crois bien qu’elle avait pleurĂ©. Moi, pas, j’étais dĂ©jĂ  une dure, du haut de mes seize ans. Mais les films, aujourd’hui, je les vois comme elle, Ă©mue par les belles dames et sĂ©duite par les beaux garçons, submergĂ©e par les Ă©motions, Ă©bahie devant la beautĂ© des paysages et des visages. Oui, surtout des visages. Vous avez vu comme c’est beau un visage, quand on s’approche, quand on pose longuement son regard dessus, quand on le caresse des yeux ? C’est beau en vrai, bien sĂ»r, irrĂ©sistiblement si on prend le temps, mais c’est beau sur l’écran, en grand, quand on redevient petites et petits, dans l’obscuritĂ©. Nous avons toutes et tous nos visages cinĂ©matographiques prĂ©fĂ©rĂ©s, ceux qui nous ont accompagnĂ©es Ă  tous les Ăąges de nos vies, chacune et chacun les siens. Nous les avons regardĂ© changer, vieillir, rajeunir dans le dĂ©sordre des bobines, des films qu’on a vus au hasard, quand ils Ă©taient programmĂ©s. Car en ce temps-lĂ , pour voir un film, il fallait attendre qu’il sorte. Aujourd’hui, pour voir des belles dames et des beaux messieurs, il suffit de cliquer. Ils nous ont construit nos images, nos façons d’ĂȘtre femme presque autant, plus parfois, que les femmes de nos famille. Moi, c’est Ava Gardner, allez, mĂȘme dans Pandora »  Garbo quand elle rit dans Ninotchka », la terrible Bette Davis dans All about Eve », Joan Crawford dans Mildred Pierce ». Ou bien ce sont Ingrid Thullin et Gunnel Lindblom, sƓurs ennemies dans Le silence », Silvana Mangano dans Riz amer », Monica Vitti dans Le dĂ©sert rouge », Jeanne Moreau dans La nuit » et dans Eva » dans sa boignoire Jean Seberg quand elle vend le New York Herald Tribune et Anna Karina dans Une femme est une femme », Delphine Seyrig dans Marienbad » mais aussi dans Captain America » [NDB –note des blogueuses Erreur de l’auteur, il s’agit de Mister Freedom »]. Et pour finir une derniĂšre image, celle du lieutenant Ripley seule dans l’espace oĂč personne ne vous entend crier. Mais lĂ , ce n’était pas le visage de Sigourney Weaver qui me fascinait, c’était le dĂ©bardeur. Le monde venait de changer, et moi avec. Oui, d’accord, ce n’est pas l’objet de ce dĂ©bat. Ni le sujet. De quoi faut-il que je vous parle, dĂ©jĂ  ? FĂ©minisme, genre et reprĂ©sentation » tout un programme. En 1981, peu de temps avant que je ne dĂ©laisse pour une trentaine d’annĂ©es le mouvement des femmes une parenthĂšse crĂ©atrice, en quelque sorte, j’ai participĂ© Ă  une commission prĂ©sidĂ©e par Anne Zelensky, chargĂ©e par Yvette Roudy de dresser un bilan de la France au fĂ©minin. Il m’avait Ă©tĂ© demandĂ© d’examiner de prĂšs l’image des femmes ». Ce que j’ai fait avec passion tellement j’étais scandalisĂ©e, et depuis longtemps, par ce que la sociĂ©tĂ© des hommes, qui s’exprimait sans freins, imposait aux femmes comme images d’elles-mĂȘmes. Nous venions, depuis quelques annĂ©es, d’en Ă©pingler quelques Ă©chantillons dans le rubrique du Sexisme ordinaire des Temps Modernes, Ă  laquelle nous travaillions avec Simone de Beauvoir. Comme j’aimais le cinĂ©ma, j’avais pris l’habitude d’évaluer les rĂŽles qu’on rĂ©servait aux femmes dans les films d’Hollywood ou d’ailleurs qui dĂ©ferlaient sur nos Ă©crans. Et quand cette rubrique collective s’est arrĂȘtĂ©e, j’ai continuĂ© un moment seule dans les Temps Modernes, Ă  raconter Ă  Simone de Beauvoir –et Ă  elle seule- d’horribles films d’horreur qui devenaient chaque annĂ©e de plus en plus sanglants, mais oĂč, enfin, les femmes commençaient Ă  prendre leur revanche. Depuis ce temps, j’ai calculĂ© que j’ai dĂ» voir une dizaine de milliers de films pour des raisons professionnelles, ce qui signifie Ă  peu prĂšs un million de minutes, soit 16 666 heures de projection. VoilĂ  le genre de calcul idiot que j’adore faire
 Aujourd’hui que les femmes dĂ©pĂšcent, trucident et Ă©parpillent les hommes Ă  grands renforts d’effets spĂ©ciaux, et s’en prennent plein la gueule en retour, je me dis qu’au moins c’est clair, la guerre des sexes a bien lieu. Et mĂȘme si ce n’est pas nous qui l’avons commencĂ©e, qu’il est temps de rĂ©flĂ©chir ensemble Ă  la façon dont nous pourrons apprendre aux enfants des deux genres Ă  s’aimer en paix. Cela passe par les images. Mais pas celles du vieux cinĂ©ma, de ce cinĂ©ma qui faisait rĂȘver mon enfance. Cela passe en fait par ce qui les produit, le regard et l’imagination de ceux qui les produisent. Maintenant, je vais vous lire une liste celle des femmes qui ont sorti des films en France ces trois derniĂšres annĂ©es. Il y en a environ 250. Sur un total d’environ 2000 films sortis sur les Ă©crans français Ă  la mĂȘme pĂ©riode, vous calculerez quel pourcentage cela fait. [Elle lit la liste, et prĂ©cise au milieu de sa lecture ] Ce n’est pas la liste des victimes du dernier crash d’avion que je suis en train de vous lire là
 [Et ajoute Ă  la fin de la liste] VoilĂ . Ce sont les femmes qui ont signĂ© des films ces trois derniĂšres annĂ©es sur nos Ă©crans. C’est pour vous dire soutenez-les, allez les voir. ‱ Et pour finir, encore une camĂ©ra, celle de Joss. Avec un grand merci pour toutes ses images "d'aujourd'hui", enregistrĂ©es et diffusĂ©es sur les ondes, et qui nous accompagnent

ParChristian Goutorbe. Le 25 juillet 2022 Ă  16h42. Pour rĂ©aliser ce grand Ă©cart entre Mai 68 et ce temple de la beautĂ© qu’est le musĂ©e Maillol de Banyuls-sur-Mer, Olivier Lorquin
PostĂ© le sois jeune et tais toi DerniĂšre-nĂ©e de notre sĂ©rie Images Ă  lire », la vidĂ©o Sois jeune et tais-toi » dĂ©crypte les affiches cĂ©lĂšbres des Ă©vĂ©nements de mai 68. EmblĂšme des Ă©tudiants et de la lutte ouvriĂšre, ces affiches simples avaient le mĂ©rite d’ĂȘtre efficaces. DĂ©couvrez la vidĂ©o pour en apprendre plus sur la censure Ă  la libertĂ© d’expression sous le gouvernement gaulliste.
LannĂ©e 2020 est lĂ , la nouvelle dĂ©cennie Ă©galement. Et le voyant Marmor a fait ses prĂ©dictions. Selon lui, "2020 est une annĂ©e de changement, de virage.A l’aube d’une nouvelle
En mai 1968, des Ă©tudiants et des artistes de l’école des Beaux-Arts de Paris fondent l’Atelier populaire. Ils y rĂ©alisent des affiches destinĂ©es Ă  ĂȘtre placardĂ©es dans les rues pour soutenir le mouvement de contestation. Nous avons sĂ©lectionnĂ© 4 affiches emblĂ©matiques. Avec ton abonnement, retrouve ton magazine en version numĂ©rique sur le site !
ImprimĂ©cĂ©lĂ©brant la rĂ©volte parisienne de mai 1968 en rouges graduĂ©s. L'impression conserve soigneusement les imperfections de l'impression originale. Texte français: Sois Jeune Ă  Tais Toi. Traduction en anglais: Soyez jeune et restez silencieux. ‱ Des millions d'Ɠuvres originales, imaginĂ©es par des artistes indĂ©pendants. Trouvez votre bonheur.
Cet article date de plus de quatre ans. La maison Artcurial Ă  Paris propose une vente inĂ©dite qui retrace l’histoire en images de Mai 68. Une collection exceptionnelle constituĂ©e de 500 affiches, dont certaines inĂ©dites, rĂ©unies par le collectionneur Laurent Storch. Article rĂ©digĂ© par France TĂ©lĂ©visions RĂ©daction Culture PubliĂ© le 13/03/2018 1158 Temps de lecture 2 min. Quand Mai 68 fait le bonheur des collectionneurs, la maison Artcurial met en vente aujourd'hui 14h30 un lot de 500 affiches qui racontent le soulĂšvement de la jeunesse de l'Ă©poque. Ce fonds exceptionnel est l'Ɠuvre du collectionneur privĂ©, Laurent Storch qui a chinĂ© et achetĂ© certaines affiches uniques. Reportage F. Hovasse / P. Quiers / L. Kulimoetoke "Sois jeune et tais toi", "Il est interdit d'interdire", "CRS SS", "Sous les pavĂ©s la plage", "La police vous parle tous les soirs Ă  20h", tous ces slogans sont dĂ©soramais inscrits dans la mĂ©moire collective. En dĂ©couvrant cette exposition, le visiteur est immersion totale dans le mouvement populaire qui a dĂ©finitivement changĂ© la sociĂ©tĂ© française. Ces affiches sont d’authentiques tĂ©moignages, historiques sociaux et artistiques, de Mai 68. Un demi-siĂšcle plus tard, les dessins de Mai 68 ont la cĂŽte. La plupart de ces affiches sont anonymes, mais certaines sont signĂ©es par des artistes sensibles au mouvement. Calder, Rancillac, Rougemont ou encore Alechinsky ont d'ailleurs reconnu aprĂšs coup leurs Ɠuvres. Certaines peuvent valoir plusieurs milliers d'Euros. Militants, rĂ©volutionnaires, artistiques, de nouveaux slogans et dessins de propagande fleurissaient chaque jour sur les murs et rendaient. "Les thĂšmes Ă©taient choisis le matin, Ă  midi on choisissait les affiches les plus intĂ©ressantes et Ă  18h, le comitĂ© rĂ©volutionnaire rassemblĂ© en AG votait pour l'affiche retenue par rapport Ă  la thĂ©matique Ă©voquĂ©e", prĂ©cise Laurent Storch. Sa collection provient de marchands et de particuliers qui les ont conservĂ©es, y compris du cĂŽtĂ© des CRS. Certaines sont assez courantes, mais il y en a une cinquantaine qu’on ne trouvera plus. Conçues collectivement par des artistes et des "idĂ©ologues", les affiches de sĂ©rigraphie au pochoir Ă©taient diffusĂ©es sitĂŽt qu'imprimĂ©es. Elles marquaient le pouls d'un mouvement qui aura durĂ© un mois, entre le dĂ©but mai et le dĂ©but juin. La fronde s'Ă©tend Ă  d'autres sujets de prĂ©occupation de la sociĂ©tĂ© française de l'Ă©poque. Si les revendications de la jeunesse sont en premiĂšre ligne, la politique, le chĂŽmage, l'environnement et le travail sont rĂ©guliĂšrement Ă  l'affiche. La jeunesse se mĂ©fie des hommes politiques et du mĂ©dia d'Etat, la rue prend le pouvoir et des imprimeries clandestines s'organisent. L'atelier des Beaux-Arts est le principal fournisseur de cette iconographie. Dix affiches sont produites et imprimĂ©es chaque jour en plusieurs couleurs Ă  500 exemplaires. DĂšs mai 1968, des amateurs rĂ©cupĂ©raient les affiches directement auprĂšs des colleurs, de façon Ă  les garder en bon Ă©tat. Protest! explore l’univers graphique des affiches créées par les mouvements contestataires de 1968 Ă  1973. Six annĂ©es d’une intense agitation politique et sociale, marquĂ©es, en France, par les mouvements Ă©tudiants et ouvriers de Mai 68, aux États-Unis, par la poursuite des luttes des minoritĂ©s, les manifestations contre la guerre du Vietnam, la montĂ©e du
La bĂȘte noire d’IsraĂ«lQui ne connaĂźt pas encore Sayyed Hassan Nasrallah, le fameux leader du Hezbollah, symbole de la rĂ©sistance dans le monde arabe et bĂȘte noire d’IsraĂ«l ? Ses portraits abondent dans les rĂ©gions chiites du Liban. Plus de 30 % de la population libanaise lui serait fidĂšle. Chacun de ses discours tĂ©lĂ©visĂ©s – il vit en clandestinitĂ© – est aussitĂŽt acclamĂ© par des tirs de joie dans la capitale, ce qui exacerbe les animositĂ©s sur le terrain. Son leitmotiv poursuivre la rĂ©sistance contre l’État hĂ©breu jusqu’à la victoire totale. Le Hezbollah en campagneLe Hezbollah et ses alliĂ©s de l’opposition parlementaire se mobilisent pour remporter les lĂ©gislatives. La route de l’aĂ©roport, la banlieue sud de Beyrouth, la Bekaa et le Sud Liban, contrĂŽlĂ©s par le Parti de Dieu, sont parsemĂ©s de ces panneaux jaunes qui se portent Ă  la dĂ©fense d’un Liban pour tous les Libanais ». En autant qu’on ne touche pas aux armes de la RĂ©sistance » – un des principaux enjeux de ces Ă©lections. Sois belle et tais-toiL’affiche choc de cette campagne Ă©lectorale. Discriminative, sexiste, misogyne ou simplement aguicheuse ? Quoi qu’il en soit, elle a suscitĂ© l’ire des mouvements fĂ©ministes locaux. Le Courant patriotique libre, parti chrĂ©tien de l’opposition – qui s’est ralliĂ© au Hezbollah -, ne s’attendait pas Ă  une telle publicité  Le chrĂ©tien dissidentLe gĂ©nĂ©ral Michel Aoun, dirigeant du Courant patriotique libre, parti majoritairement chrĂ©tien. Ses dĂ©tracteurs le traite de psychopathe », ses partisans, de visionnaire ». Disons qu’en signant un pacte d’entente entre son parti, autrefois reconnu pour sa lutte contre l’occupant syrien, et le Hezbollah, soutenu par l’Iran et la Syrie, cet ancien commandant de l’armĂ©e en a surpris plus d’un. Ses critiques l’accusent d’avoir retournĂ© sa veste pour servir ses propres intĂ©rĂȘts. Slogan ou conviction ?Tadamon solidaritĂ©. Ce mot se veut unificateur et porteur d’espoir. Mais il convient mal au parti chiite Amal, rĂ©putĂ© pour ses nombreuses dĂ©rives, et dont le leader, Nabih Berry, un ancien seigneur de la guerre, a su se maintenir Ă  la tĂȘte du Parlement libanais depuis 1992 grĂące Ă  l’appui de la Syrie. Grand alliĂ© de Damas, proche du Hezbollah par principe, le parti Amal – aussi appelĂ© mouvement des dĂ©shĂ©ritĂ©s » lorsqu’il a Ă©tĂ© fondĂ©, au dĂ©but des annĂ©es 1970 – sait maĂźtriser l’art du slogan » pour sĂ©duire ses partisans. Tripoli, bastion sunniteDans le nord du Liban, Tripoli, deuxiĂšme ville en importance du pays aprĂšs Beyrouth, affiche ses couleurs. Les façades des quartiers populaires sont couvertes d’affiches de candidats. Dans ce bastion sunnite, c’est le camp du 14 mars qui mĂšne le jeu. Le 7 juin, les Tripolitains voteront en masse pour prĂ©venir une victoire du parti chiite Hezbollah et de ses alliĂ©s. Aux suivants !Plus de 580 sont en lice pour combler les 128 siĂšges du Parlement. La rĂ©partition des siĂšges se fait par circonscription Ă©lectorale et selon des quotas communautaires. Tripoli, par exemple, sera reprĂ©sentĂ©e par 8 dĂ©putĂ©s dans le futur gouvernement 5 sunnites, 1 alawite, 1 grec orthodoxe et 1 maronite. Les trois candidats que l’on voit ici se prĂ©sentent comme candidats sunnites. Parmi eux, l’ancien premier ministre intĂ©rimaire, Nagib Mikati quatriĂšme affiche Ă  partir de la gauche . PĂšre et filsDans les grandes familles libanaises, l’hĂ©ritage politique se transmet de pĂšre en fils. C’est le cas des Hariri. AprĂšs l’assassinat de Rafic Hariri, le 14 fĂ©vrier 2005, son fils Saad a Ă©tĂ© rappelĂ© d’Arabie saoudite pour poursuivre l’action de son pĂšre. Aujourd’hui, Saad est Ă  la tĂȘte du Courant du futur. Son principal cheval de bataille prĂ©server la libertĂ© et la souverainetĂ© du Liban, et soutenir l’action du Tribunal pĂ©nal international, chargĂ© de mener l’enquĂȘte sur les meurtriers prĂ©sumĂ©s de son pĂšre et des martyrs de l’indĂ©pendance. Avec et pour le peuple ?Saad Hariri. Les rues qui lui sont acquises regorgent de portraits du leader sunnite. Souriant, cĂ©rĂ©monieux, icĂŽne ou homme du peuple, le fils de Rafic Hariri rassemble, lors de ses discours, des centaines de milliers de partisans des quatre coins du pays. Ce qui provoque le mĂ©pris chez ses dĂ©tracteurs, qui n’hĂ©sitent pas Ă  affirmer qu’il achĂšte sa popularitĂ© argent comptant » grĂące au soutien sans faille de l’Arabie Saoudite, son principal bailleur de fond. Attention guerre ! Le Parti chrĂ©tien des Forces libanaises, alliĂ© au camp du 14 mars, a choisi de mettre les Ă©lecteurs en garde. Rappelant la prise d’assaut de Beyrouth-Ouest par les militants du Hezbollah et dAmal en mai 2008, qui s’est soldĂ©e par une centaine de morts et de nombreux blessĂ©s, ce panneau incite la population Ă  rĂ©flĂ©chir et
 Ă  agir, afin que l’histoire ne se rĂ©pĂšte pas. Face Ă  ce milicien armĂ© d’un lance-roquette utilisĂ© pendant les affrontements de mai 2008, cette citoyenne peut-elle vraiment ne rien faire ? » lit-on sur l’affiche. GĂ©nĂ©ration fils de
DĂ©trompez-vous, Bachir Gemayel n’est pas ressuscitĂ© ! L’ancien leader chrĂ©tien KataĂ«b, consacrĂ© prĂ©sident du Liban quelques jours avant d’ĂȘtre assassinĂ©, en septembre 1982, est bien mort. C’est maintenant au jeune Nadim, son fils de 27 ans, que revient le flambeau. Mais ses collaborateurs ont vite compris qu’il serait difficile pour lui de se dĂ©marquer d’une figure politique aussi adulĂ©e que son pĂšre. Mieux vaut donc se servir de son image la ressemblance entre le pĂšre et le fils Ă©tant Ă©vidente au point de les confondre. Martyr de l’indĂ©pendanceAux portraits des candidats Ă©lectoraux se superpose la mĂ©moire des martyrs. Sur la façade du quartier gĂ©nĂ©ral du parti chrĂ©tien KataĂ«b, figure Pierre Gemayel – fils de l’ancien prĂ©sident Amine -, ancien dĂ©putĂ© assassinĂ© par balles Ă  Beyrouth, le 21 novembre 2006. Tout comme les journalistes Samir Kassir et Gebran TuĂ©ni, tuĂ©s un an plus tĂŽt, Pierre Gemayel Ă©tait un pilier de la rĂ©volution du CĂšdre qui, au printemps 2005, a entraĂźnĂ© le retrait de l’armĂ©e syrienne du Liban, aprĂšs 30 ans d’occupation. Toujours les mĂȘmes Le Liban est gouvernĂ© par les mĂȘmes zaĂŻms chefs qu’au temps de la guerre fratricide qui a dĂ©chirĂ© le pays de 1975 Ă  1990. PrĂšs de 200 000 morts et des centaines de milliers de blessĂ©s n’ont rien changĂ© Ă  la mentalitĂ© sectaire et clanique de la rĂ©gion. Ceux qui connaissent Beyrouth reconnaĂźtront ici Samir Geagea, ancien seigneur de la guerre qui, aprĂšs avoir purgĂ© une peine de prison de 11 ans, est revenu en force sur la scĂšne politique en tant que leader du parti chrĂ©tien des Forces libanaises. Trouvez l’erreurNon, ce n’est pas une illusion d’optique il s’agit bien de l’ancien dirigeant irakien Saddam Hussein qui trĂŽne sur ce toit de tĂŽle dans la banlieue de Tripoli. Le propriĂ©taire – un commerçant libanais qui dit avoir bien connu le lion de Bagdad » – a refusĂ© de retirer le portrait, mĂȘme en pĂ©riode de campagne Ă©lectorale. Afin d’éviter des heurts qui prennent souvent des allures de guerre civile » dans ce quartier dĂ©favorisĂ© et surarmĂ©, les autoritĂ©s ont fermĂ© les yeux. De nombreux rĂ©fugiĂ©s irakiens ont Ă©lu domicile dans le secteur. Jeune, femme et fiĂšreJolie, dynamique, engagĂ©e, Nayla TuĂ©ni, a 27 ans, est l’une des 12 femmes candidates de cette campagne. C’est la fille de Gebran TuĂ©ni, PDG du quotidien arabe An Nahar, tuĂ© dans un attentat Ă  la voiture piĂ©gĂ©e en dĂ©cembre 2005, et la petite-fille de Nadia TuĂ©ni, poĂ©tesse libanaise, et de Ghassan TuĂ©ni, Ă©crivain, fondateur de l’An Nahar, ex-ministre et actuel dĂ©putĂ©. Nayla fait partie de cette jeune gĂ©nĂ©ration qui veut faire bouger les choses ». Candidate du 14 mars, elle compte tailler sa place dans le paysage politique dominĂ© par les hommes.
Toutd’abord, en moyenne, les femmes noires sont plus fortes que les autres. Mais d’ajouter que ce n’est pas cela qui influe dans leur propension Ă  ĂȘtre plus laide. Mon dieu que cet
Alain Delon Ă  gauche et Jean-Paul Belmondo Ă  droite se serrent la main, lors de la remise de la LĂ©gion d'honneur Ă  ce dernier, le 23 septembre 1980 Ă  Paris - Gabriel DUVAL © 2019 AFPIls ont menĂ© des carriĂšres parallĂšles pendant plus de 50 ans. Jean-Paul Belmondo et Alain Delon ont souvent Ă©tĂ© comparĂ©s, pourtant leurs styles sont aux deux vieux lions du cinĂ©ma français Jean-Paul Belmondo et Alain Delon ont connu des carriĂšres parallĂšles, le plus souvent au sommet du box-office, et leur amitiĂ© teintĂ©e d'une certaine rivalitĂ© a nourri la lĂ©gende de ces deux caractĂšres que tout Ă  six jours d'Ă©cart en mars 1960 que les deux comĂ©diens se rĂ©vĂšlent au grand jour Jean-Paul Belmondo, l'insolent au physique ordinaire, fait sensation dans l'ovni A bout de souffle, tandis que le public se pĂąme devant le regard aigue-marine d'Alain Delon dans Plein jeunes hommes se connaissent dĂ©jĂ  ils s'Ă©taient rencontrĂ©s sur le tournage de Sois belle et tais-toi. DĂ©butants, ils campent alors des petits escrocs. A l'Ă©poque, c'est Ă  Delon que revient le rĂŽle du bagarreur hĂąbleur. Belmondo incarne une petite frappe, planquĂ©e et taciturne."Une amitiĂ© qui ne s'est jamais tarie"Ils cĂŽtoient les mĂȘmes bars Ă  Saint-Germain-des-PrĂ©s "Entre nous, commence une amitiĂ© qui ne s'est jamais tarie", Ă©crit Bebel 60 ans plus tard dans son autobiographie Mille vies valent mieux qu' pourtant, "on nous opposera tout au long de nos vies, cherchant Ă  crĂ©er une adversitĂ© dont la lĂ©gende pourrait se nourrir", poursuit-il. "En fait nous sommes proches, en dĂ©pit d'une divergence Ă©vidente d'origines sociales. Son enfance a Ă©tĂ© aussi triste, pauvre et solitaire que la mienne a Ă©tĂ© joyeuse, bourgeoise et pleine d'amour".Belmondo est nĂ© en 1933 Ă  Neuilly ouest de Paris dans une famille aimante d'artistes. Il fait le conservatoire avec la bĂ©nĂ©diction de son pĂšre. Acteur inclassable, animal et Ă©nergique, il incarne la gĂ©nĂ©ration d'aprĂšs-guerre qui veut croquer la vie. Avec son physique de quidam, il se glisse facilement dans la peau du "titi parisien", proche du public. C'est pour cette raison que Jean-Luc Godard l'embauche dans la rue pour "A bout de Souffle".NĂ© en 1935, Alain Delon est confiĂ© Ă  4 ans, au divorce de ses parents, Ă  une famille d'accueil dont le pĂšre est gardien Ă  la prison de Fresnes. Pensionnaire, il commet plusieurs fugues. Quand il s'engage en Indochine, personne ne le retient. Sombre, taciturne, Ă©corchĂ© vif... Il ne partage pas la sĂ©rĂ©nitĂ© intĂ©rieure qui va profiter Ă  jeunesseToutefois, les deux hommes poursuivent leur course en tĂȘte du box-office, cultivant chacun leur image, incarnant tour Ă  tour, comme deux frĂšres siamois, des flics, des truands et des joue sur l'humour, la lĂ©gĂšretĂ©, la dĂ©sinvolture quand Alain Delon fait figure de solitaire tendu et 1970, Jacques Deray rĂ©unit les deux dans Borsalino, l'histoire de deux jeunes malfaiteurs qui se lient d'amitiĂ© et deviennent les rois de la pĂšgre Ă  le film, les deux hommes cheminent cĂŽte Ă  cĂŽte dans leur Ă©clatante jeunesse, costumes trois piĂšces impeccables et pochettes assorties, le cigare au coin des lĂšvres, le fameux chapeau de gangster lĂ©gĂšrement inclinĂ© sur la tĂȘte. Ils deviennent insĂ©parables aprĂšs une bagarre mĂ©morable oĂč ils se rendent coup pour une brouille Ă©clate entre les deux vedettes Ă  propos d'une formulation contractuelle non respectĂ©e sur l'affiche. Belmondo, procĂ©durier, traĂźne Delon devant les tribunaux et gagne. "C'Ă©tait des querelles d'amoureux", balaiera-t-il des annĂ©es plus tard. Il n'empĂȘche, Bebel ne se rendra pas Ă  l'avant-premiĂšre du film qui fait prĂšs de 5 millions d'entrĂ©es."Il ne peut y avoir de rivalitĂ© entre nous"Les deux hommes se sont toujours rendu hommage. "Jean-Paul a suivi son chemin. Moi un autre, c'est tout. C'est une grande vedette nationale. Il a beaucoup de talent et comme moi, il aime son mĂ©tier et les risques", dĂ©clarait Alain Delon. "On parle toujours de cette soi-disant rivalitĂ© mais, pour moi, il ne peut y avoir de rivalitĂ© entre nous, on n'a absolument pas le mĂȘme emploi. Delon ne me gĂȘne pas et je ne pense pas que je le gĂȘne", renchĂ©rissait Jean-Paul Leconte les rĂ©unit en 1998 dans Une chance sur deux. "A aucun moment nous n'aurions pu, la veille du tournage, intervertir leurs rĂŽles", racontait le rĂ©alisateur. "Ils sont diamĂ©tralement opposĂ©s, ce qui les rend complĂ©mentaires et, en mĂȘme temps, extrĂȘmement proches l'un de l'autre. C'est trĂšs curieux, deux acteurs, qui, comme eux, ont Ă  la fois tout et rien Ă  voir avec l'autre."Une amitiĂ© indĂ©fectible, mĂ©lange de tendresse et de virilitĂ©, que Paris Match mettra en scĂšne jusqu'au bout, en juin 2019, dans un bras de fer en bras de chemise."Je l’aime et je l’admire, n’en dĂ©plaise Ă  ceux qui nous ont opposĂ©s dans une rivalitĂ© ­absurde, livrait en 2006 Alain Delon Ă  l'hebdomadaire. Justement parce que nous sommes uniques dans notre genre, et incomparables, nous n’avons jamais Ă©tĂ© en concurrence. Ni dans nos vies de cinĂ©ma, ni dans nos vies privĂ©es."Alain Delon, la voix tremblant d'Ă©motion, s'est dit ce lundi "complĂštement anĂ©anti".
Entout cas significative d’un Ă©tat de crise chronique entre parents et enseignants. Une guerre de tranchĂ©es oĂč chacun attend les missiles de l’autre camp. D’un cĂŽtĂ© les profs, mi-victimes, mi-hĂ©ros. Ils supportent Ă  longueur d’annĂ©e des Ă©lĂšves remuants, des programmes intenables et des mĂ©thodes discutables.
L'ironie de la situation ne dĂ©plaĂźt pas au soixante-huitard Daniel BenoĂźt, aujourd'hui retraitĂ© dans un village tranquille de haute septuagĂ©naire a sorti de ses archives personnelles une quarantaine d'affiches créées en mai 1968, la plupart par des Ă©tudiants de l'Ă©cole des Beaux arts ou des arts dĂ©coratifs de Paris. Et il s'apprĂȘte Ă  les exposer au coeur de la chiraquie, dont une partie de l'hĂ©ritage politique est affiliĂ© au gĂ©nĂ©ral de Gaulle. Hasard ou coĂŻncidence du calendrier, l'exposition Ă  la salle polyvalente de Chirac-Bellevue, entre Ussel et Neuvic, est programmĂ©e pour le dimanche 13 mai ; 50 ans auparavant exactement, le 13 mai 1968, les syndicats rejoignaient le mouvement Ă©tudiant de contestation, et lançaient une grĂšve gĂ©nĂ©rale qui allait paralyser le pays. "Sois jeune et tais toi" ; "la chienlit c'est encore lui" ; "l'Ă©lan est donnĂ©, lutte prolongĂ©e" Daniel Benoit l'a vĂ©cu. Cette annĂ©e-lĂ , il avait une vingtaine d'annĂ©es et travaillait chez CitroĂ«n. En mai 1968, il a fait partie des piquets de grĂšve. C'est lĂ  qu'il a commencĂ© sa "collection" "Des affiches, il y en avait plein les murs de l'usine. J'en ai dĂ©collĂ©es, des amis m'en ont apportĂ©es et j'en ai rĂ©cupĂ©rĂ©es au quartier latin Ă  Paris", coeur des Ă©vĂ©nements de ce printemps rĂ©volutionnaire. Mai 68 Un mouvement qui a dĂ©coincĂ© une sociĂ©tĂ© qui l’était sacrĂ©ment ! » "Sois jeune et tais toi" ; "la chienlit c'est encore lui" ; "l'Ă©lan est donnĂ©, lutte prolongĂ©e"... Slogans et dessins ont bien traversĂ© le demi-siĂšcle, pieusement conservĂ©es par Daniel BenoĂźt, dans une remise. Certaines affiches portent le tampon de l'Ă©cole des arts dĂ©coratifs ou de "l'Atelier populaire, ex-Ă©cole des Beaux-arts". Le retraitĂ© a mĂȘme celle publiĂ©e fin mai 1968, en faveur du gĂ©nĂ©ral de Gaulle, alors prĂ©sident de la RĂ©publique, avant la grande manifestation du 31 mai, qui allait marquer la fin progressive de la contestation. Dans la dĂ©coration de la maison de Daniel BenoĂźt, l’Ɠil du visiteur ne peut manquer deux pavĂ©s en granit. Daniel BenoĂźt assure qu'il n'en a jamais jetĂ©s sur les CRS ou les forces de l'ordre. En revanche, il n'a pas gardĂ© sa carte d'adhĂ©rent Ă  la CGT "Je l'ai dĂ©chirĂ©e juste aprĂšs 68".
Lapériode de Mai 68 est marquée par une révolution étudiante du fait de leur manque de libertés et de la politique autoritaire du General De Gaulle. J'ai constaté que sur
Avec toute la subjectivitĂ© et les limites inhĂ©rentes Ă  l’exercice, nous avons choisi et analysĂ© des films importants signĂ©s par des rĂ©alisatrices qui mettent en jeu un changement de point de vue, Ă©crivant ainsi une nĂ©cessaire contre-histoire fĂ©minine du cinĂ©ma. Dossier coordonné par Jean-Marc Lalanne, avec Philippe Azoury, Emily Barnett, Romain Blondeau, Patrice Blouin, Iris Brey, Faustine Chevrin, Luc Chessel, Bruno Deruisseau, Marilou Duponchel, Hélène Frappat, Jacky Goldberg, Mia Hansen-LĂžve, Murielle Joudet, Thierry Jousse, Olivier Joyard, Gérard Lefort, Eponine Le Galliot, Elena López, Axelle Ropert, Théo Ribeton, Justine Triet. 1906 / Madame a des envies d’Alice Guy Pendant que d’autres prennent pour sujet les trains, les usines et les repas du dimanche, Alice Guy met en scĂšne une femme enceinte qui a l’irrĂ©pressible besoin d’insĂ©rer des objets phalliques dans sa bouche. Outre ce point de dĂ©part narratif intrĂ©pide, la cinĂ©aste utilise pour la premiĂšre fois au cinĂ©ma le gros plan Ă  des fins dramatiques. Elle a l’intuition gĂ©niale de rapprocher le corps de la camĂ©ra du visage de son hĂ©roĂŻne au moment oĂč cette derniĂšre parvient Ă  ses fins et se dĂ©lecte de sucer une friandise volĂ©e Ă  une enfant, nous permettant de ressentir de maniĂšre plus intense cet assouvissement physique. L’utilisation du gros plan permet donc d’accĂ©der Ă  la subjectivitĂ© de la femme enceinte la femme qui suce n’est pas un spectacle Ă©rotique mais diffuse un dĂ©sir fĂ©minin. I. B. Avec Alice Guy Fr., 4 min 15 1914 / Charlot et les Saucisses de Mabel Normand Mabel Normand fut la premiĂšre vedette fĂ©minine du burlesque muet, peut-ĂȘtre la seule Ă  approcher la catĂ©gorie de ses lĂ©gendes, oĂč trĂŽne Chaplin. C’est d’ailleurs en tant que second rĂŽle d’un de ses films qu’apparaĂźt en 1914 le personnage de Charlot. Il deviendra un sidekick rĂ©gulier – en passe de la doubler en notoriĂ©tĂ© dans ce film rĂ©alisĂ© par Normand trois mois plus tard. Elle s’y met en scĂšne en vendeuse de hot-dogs et trahit sĂ»rement ce qui se trame derriĂšre la camĂ©ra le vagabond apparaĂźt et la courtise, dans le but de lui chiper ses saucisses. La suite de la vie de Mabel Normand sera funeste empĂȘtrĂ©e en 1921 dans une sĂ©rie de scandales mĂȘlant affaires de mƓurs et homicide l’affaire Arbuckle, elle tombe dans l’oubli et meurt de la tuberculose en 1930. T. R. Avec Charles Chaplin, Mabel Normand, Dan Albert 10 min 1920 / La FĂȘte espagnole de Germaine Dulac Soledad, une ancienne danseuse, est convoitĂ©e par deux hommes. Elle les incite Ă  se battre en duel, promettant de se donnerau vainqueur. Pendant ce temps, elle s’égare avec le jeune Juanito, dansant toute la nuit, se remĂ©morant les belles annĂ©es de sa jeunesse passĂ©e. Avec La FĂȘte espagnole, Dulac semble anticiper toute la vague dite impressionniste du cinĂ©ma français Louis Delluc en partie, mais Ă©galement Jean Epstein. Grande fĂ©ministe, elle est considĂ©rĂ©e comme une figure majeure de l’avant-garde cinĂ©matographique. Elle prĂŽne un art neuf, pur et intĂ©gral, se dĂ©tournant du théùtre et de la littĂ©rature et cherchant sans cesse Ă  repousser les limites du rĂ©cit et de l’esthĂ©tique. F. C. Avec Eve Francis, Gabriel Gabrio, Jean Toulout Fr., 1 h 07 1926 / Les Aventures du prince Ahmed de Lotte Reiniger Nous sommes deux ans avant la naissance de Mickey et bien loin de la mass animation dont Walt Disney posera bientĂŽt les fondations lorsque l’Allemande Lotte Reiniger crĂ©e, Ă  27 ans, Les Aventures du prince Ahmed. Proche des avant-gardes expressionnistes, cette pionniĂšre de l’animation a, en tant que dĂ©coratrice pour le théùtre, Ă©laborĂ© un art de la silhouette dĂ©coupĂ©e qui vient sublimer ce rĂ©cit muet en ombres chinoises, composite de plusieurs contes des Mille et Une Nuits. Applaudi par Renoir ou Brecht, il restera l’unique chef-d’Ɠuvre de Reiniger. Elle demeure cependant active presque jusqu’à sa mort en 1981, et connaĂźt encore aujourd’hui une postĂ©ritĂ© notable avec les films de Michel Ocelot, qui lui empruntent tant ses techniques que ses thĂšmes orientalistes. T. R. All., 1 h 20 1940 / Dance, Girl, Dance de Dorothy Arzner Judy Maureen O’Hara et Bubbles Lucille Ball montent sur scĂšne tous les soirs pour livrer un spectacle de danse dans deux styles diffĂ©rents Bubbles est tout en effeuillage et sĂ©duction, Judy, elle, enchaĂźne de classiques arabesques. Dans la scĂšne clef du film et de l’Ɠuvre d’Arzner, Judy se fait huer par la foule qui veut voir plus de chair. Elle s’arrĂȘte alors de danser et livre un discours fĂ©ministe. Cette sĂ©quence se termine par une bagarre entre Judy et Bubbles. Cette lutte entre ces deux corps fĂ©minins, celui qui dĂ©nonce le male gaze et celui qui veut faire partie du systĂšme, matĂ©rialise ainsi ce qui hante le cinĂ©ma de Dorothy Arzner la tension permanente entre le dĂ©sir de montrer des femmes qui rĂ©flĂ©chissent Ă  la performance et Ă  la performativitĂ© du genre fĂ©minin et celui de pouvoir rassembler une foule dans une salle. Une lutte qui symbolise aussi la violence Ă©manant de la dissimulation du dĂ©sir lesbien, que ce soit celui de la cinĂ©aste ou celui de ses hĂ©roĂŻnes. I. B. Avec Maureen O’Hara, Lucille Ball 1 h 30 1946 / Ritual in Transfigured Time de Maya Deren Une femme souriante Maya Deren elle-mĂȘme manipule un long morceau de laine. Une autre Rita Christiani tire le fil jusqu’à elle. Une troisiĂšme AnaĂŻs Nin les observe en robe noire. L’espace du film s’ouvre ensuite dans un enchaĂźnement cadencĂ© de gestes, regards, danses, comme si le cinĂ©ma proposait subitement une chorĂ©graphie du monde initiĂ©e par l’expĂ©rience et le corps des femmes. ScandĂ© par des visions sublimes proches de la transe, ce standard du cinĂ©ma non-narratif rĂ©alisĂ© en 1946 a aussi marquĂ© les esprits par son utilisation pionniĂšre de procĂ©dĂ©s aujourd’hui banalisĂ©s arrĂȘts sur images, ralentis. AmĂ©ricaine d’origine ukrainienne, connue pour de nombreux autres films comme Meshes of the Afternoon 1943, avec Alexander Hammid, Maya Deren a eu une importance capitale au moins Ă  deux titres. D’abord dans la communautĂ© du cinĂ©ma expĂ©rimental, dont elle tenta de regrouper les forces en crĂ©ant une coopĂ©rative, avant que la mort ne l’emporte prĂ©maturĂ©ment en 1961 – Jonas Mekas reprendra alors le flambeau. Ensuite, dans la mise en Ɠuvre d’un cinĂ©ma fĂ©minin, tant ses hĂ©roĂŻnes semblent crĂ©er leur espace propre, Ă  l’image du personnage principal de Ritual in Transfigured Time avançant la main ouverte devant elle et profitant de l’énergie d’autres femmes pour se mĂ©tamorphoser. O. J. Avec Rita Christiani, Maya Deren, AnaĂŻs Nin 15 min 1947 / Paris 1900 de Nicole VĂ©drĂšs Chronique de la ville de Paris de 1900 Ă  1914, le documentaire Paris 1900 est aujourd’hui une rĂ©fĂ©rence en termes de montage. La cinĂ©aste et romanciĂšre Nicole VĂ©drĂšs passe en revue la vie mondaine parisienne entre la Belle Epoque et le cataclysme de la guerre de 1914. DĂ©fini par le critique AndrĂ© Bazin comme “quelque chose de monstrueusement beau dont l’apparition bouleverse les normes esthĂ©tiques du cinĂ©ma”, c’est l’élĂ©gance du ton ainsi que son goĂ»t prononcĂ© pour l’image d’archives qui ont fait de l’Ɠuvre un classique aux croisements des arts. F. C. Fr., 1 h 19 1950 / Outrage d’Ida Lupino Actrice, Ida Lupino est aussi connue pour avoir Ă©tĂ© l’une des seules cinĂ©astes femmes Ă  exercer Ă  Hollywood dĂšs la fin des annĂ©es 1940, notamment grĂące Ă  Emerald Films, la sociĂ©tĂ© de production indĂ©pendante qu’elle fonde avec son mari. Ses films se caractĂ©risent par un rĂ©alisme Ăąpre de sĂ©rie B, des sujets de sociĂ©tĂ© qu’elle filme les yeux ouverts, en allant droit au but, sans affĂ©teries ni glamour. On lui doit notamment un film sur les jeunes filles obligĂ©es d’abandonner leurs enfants Not Wanted, un autre sur les ravages de la bigamie The Bigamist et Outrage, rare film Ă  mettre au centre de son rĂ©cit une victime de viol et Ă  observer les consĂ©quences de ce cataclysme sur sa psychĂ©. Lupino ne cherche jamais Ă  contourner son sujet ou Ă  lui adjoindre une autre strate narrative le trauma est tellement puissant qu’il aspire tout le reste. AprĂšs le drame, Ann, l’hĂ©roĂŻne, prend la fuite comme si elle avait commis un acte rĂ©prĂ©hensible, percluse de honte par son statut de victime. Se croyant sur la voie de l’oubli, elle se retrouve trĂšs vite rattrapĂ©e par sa mĂ©moire traumatique – le film fait montre d’une grande justesse psychologique. Sans optimisme excessif mais avec un dĂ©sir dĂ©vorant d’éduquer son public, Outrage dĂ©ploie toutefois la possibilitĂ© d’une guĂ©rison pour sa victime et la nĂ©cessaire prise en charge des criminels. M. J. Avec Mala Powers, Tod Andrews, Robert Clarke 1 h 15 1951 / Olivia de Jacqueline Audry En attendant Varda, Jacqueline Audry 1908-1977 est la premiĂšre cinĂ©aste française de l’aprĂšs-guerre qui s’aventure dans la zone alors interdite du fĂ©minisme revendiquĂ©e. En 1946, elle rĂ©alise Les Malheurs de Sophie oĂč l’hĂ©roĂŻne est mĂ©tamorphosĂ©e en adolescente qui refuse un mariage arrangĂ©. Mais c’est en 1951 avec Olivia que le propos devient explicite. D’aprĂšs le roman Ă©ponyme de Dorothy Bussy 1949, adaptĂ© par sa sƓur Colette Audry, Ă©crivaine proche de Beauvoir et de Sartre, Olivia est l’histoire d’un couple de femmes. D’une part, Julie Edwige FeuillĂšre, directrice d’un pensionnat de jeunes filles de bonnes familles. D’autre part, Clara Simone Simon, son associĂ©e et amante. L’arrivĂ©e d’une nouvelle Ă©lĂšve, Olivia Marie-Claire Olivia, va bouleverser les deux femmes. Avec une frontalitĂ© sidĂ©rante pour l’époque, l’homosexualitĂ© fĂ©minine n’est pas Ă  lire entre les images, elle est de chaque plan, toute de chair et de gaĂźtĂ©, cadrĂ©e avec une sensualitĂ© contagieuse. Olivia est autant un film militant que le chef-d’Ɠuvre d’une grande rĂ©alisatrice. G. L. Avec Simone Simon, Edwige FeuillĂšre Fr., 1 h 35 1953 / The Bigamist de Ida Lupino La beautĂ© des sĂ©ries B d’Ida Lupino tient Ă  la fois au respect du cadre demandĂ© par le genre atmosphĂšre de film noir, efficacitĂ© dramatique absolue et Ă  un intĂ©rĂȘt pour des sujets peu traitĂ©s par ailleurs. Ici, la double vie d’un homme dans la Californie des annĂ©es 50, oĂč le jeu des convenances sociales et conjugales est scrutĂ© comme une prison collective. Beau film sur une masculinitĂ© tout sauf triomphante, The Bigamist s’affirme comme l’un des sommets de l’Ɠuvre de l’actrice-rĂ©alisatrice. Appartenant au domaine public, il est visible gratuitement sur Internet. Avec Joan Fontaine, Ida Lupino, Edmund Gwenn AmĂ©ricain, 1h23 1962 / ClĂ©o de 5 Ă  7 d’AgnĂšs Varda Sorti sur les Ă©crans en 1962, ClĂ©o de 5 Ă  7 relate deux heures de la vie d’une femme persuadĂ©e d’ĂȘtre malade. Premier choc le film se dĂ©roule en temps rĂ©el, Ă  la maniĂšre d’un compte Ă  rebours tendu vers son dĂ©nouement – l’annonce de rĂ©sultats mĂ©dicaux qui fixeront l’hĂ©roĂŻne sur son destin. L’autre surprise tient Ă  l’omniprĂ©sence du personnage fĂ©minin Ă  l’écran dans le contexte trĂšs phallocentrĂ© du cinĂ©ma de l’époque – Nouvelle Vague comprise –, le regard de Corinne Marchand devient le seul point de vue, une silhouette souveraine et radieuse, la seule marche Ă  suivre. ClĂ©o est un ange dont le narcissisme se mesure Ă  la quantitĂ© de fois oĂč elle se regarde dans une glace. Jusqu’ici, le monde Ă©tait pour elle un ocĂ©an de reflets lui renvoyant complaisamment son image – les vitrines des magasins, le regard des autres. Avec la peur, l’image se brouille. Par le ballet Ă©tourdissant des passants, le son des actualitĂ©s Ă  la radio, les nombreuses voix off, Varda projette son hĂ©roĂŻne dans un tourbillon d’altĂ©ritĂ© auquel cette “poupĂ©e” autocentrĂ©e et choyĂ©e par les autres Ă©tait restĂ©e hermĂ©tique. La cinĂ©aste offre Ă  ClĂ©o, objet passif et admirĂ©, engoncĂ© dans sa coquetterie, de regarder Ă  son tour. Pour devenir sujet de sa propre vie. La crĂ©ation sans Dieu de la femme. E. B. Avec Corinne Marchand, Sami Frey Fr., 1 h 30 1963 / La maison est noire de Forough Farrokhzad En 1963, soit quatre ans avant sa mort prĂ©coce Ă  l’ñge de 32 ans, la poĂ©tesse iranienne Forough Farrokhzad rĂ©alisait son unique film, La maison est noire, poĂšme de vingt minutes sur une lĂ©proserie Ă  Baba Baghi, au nord-ouest de l’Iran. ConsidĂ©rĂ© comme l’un des prĂ©curseurs de la Nouvelle Vague iranienne, c’est pourtant un film mĂ©connu. Il nous aurait Ă©tĂ© apportĂ© par le vent, comme un secret, et ce secret porte sur l’un des tabous ultimes la maladie. Farrokhzad filme le quotidien de cette maison peuplĂ©e par celles et ceux que l’on a chassĂ©es de la ville, qu’on ne veut plus voir, qui sont censĂ©es vivre comme des ombres. Farrokhzad les comprend, elle qui Ă©crivait ailleurs, dans l’un de ses poĂšmes “Toute mon existence est un verset obscur.” Elle n’a pas peur de pĂ©nĂ©trer dans leur intimitĂ©. Elle s’y enfonce, jusqu’aux entrailles, et pourtant, Ă  l’image, on ne voit jamais de malades, car face Ă  sa camĂ©ra tous les corps sont d’une beautĂ© Ă©piphanique. Oui, la beautĂ© n’existe que dans l’Ɠil de celui qui regarde, et ici on n’aura qu’à se laisser bercer par la douce violence de ses images et par la poĂ©sie qu’elle tire d’un cri primitif et dĂ©chirant. Peu importe alors s’il s’agit d’un film fort, d’un film beau, ou mĂȘme d’un chef-d’Ɠuvre comme l’avait qualifiĂ© Chris Marker, Ă  qui l’on doit sa diffusion en France. La maison est noire est bouleversant car il nous emporte dans le courant souterrain d’une voix subalterne. Car, Ă  travers ce film, Farrokhzad s’empare d’une place que la sociĂ©tĂ© ne lui avait pas donnĂ©e. Et comme l’expliquait la critique littĂ©raire Gayatri Spivak dans son essai sĂ©minal de 1988, Can the Subaltern Speak ?, les subalternes ne sont pas des ĂȘtres de silence, seulement ilelles ne sont pas Ă©coutĂ©s, ilelles chuchotent dans les plis de l’histoire. En cela, La maison est noire reste un film capital qui nous rapporte la voix de tous ces sujets subalternes les femmes, les malades, les corps non normatifs comme un courant Ă©lectrique et secret, comme un poison Ă©pais, comme un sortilĂšge. E. L. Avec Forugh Farrokhzad, Ebrahim Golesta Iran, 20 min 1965 / Le Bonheur d’AgnĂšs Varda “Je suis moi, encore plus”, rĂ©pond François, avec un sourire et des caresses, quand sa maĂźtresse lui demande comment il peut aimer deux femmes. François se croyait parfaitement heureux avec ThĂ©rĂšse et leurs deux enfants. Il l’était. Mais il a rencontrĂ© Emilie, ils sont tombĂ©s amoureux, et maintenant, c’est encore mieux. Mieux, ennemi du bien ? Peut-ĂȘtre. Mais, Ă  aucun moment, AgnĂšs Varda ne considĂšre cette histoire du point de vue de la morale. Il aurait fallu pour cela qu’elle charge son personnage de doutes et de regrets. Il n’en est rien. Les fleurs l’intĂ©ressent plus que les remords. Le prĂ©sent et la beautĂ© davantage que le mal – celui que François fait Ă  sa femme, par son bonheur Ă©goĂŻste. Si elle filme les caresses, elle filme leur sensualitĂ©, pas leur caractĂšre coupable. Son regard empreint d’une immense douceur, en fait Ă  mes yeux toute la force. La cruautĂ© du rĂ©cit peut nous blesser. Elle nous blesse. Mais pourquoi se rĂ©volter si le dĂ©sir a rĂ©sistĂ©, si la vie a repris ses droits, si c’est Ă  elle que la cinĂ©aste a voulu donner le dernier mot ? En revoyant ce film, j’ai Ă©tĂ© de nouveau Ă©blouie par la libertĂ© d’AgnĂšs Varda, par son insolente tranquillitĂ©. Le bonheur, la plĂ©nitude, la joie c’est ce qu’elle incarne pour moi. Joie de vivre, de voir, d’aimer. Et de filmer, sans remords, sans honte, sans la mauvaise conscience qui nous menace aujourd’hui. Varda disparue, qui osera encore filmerle bonheur ? M. Avec Jean-Claude Drouot, Marie-France Boyer Fr., 1 h 19 1966 / Les Petites Marguerites de Věra ChytilovĂĄ “Ça te gĂȘne ? – Non” Ă  Prague dans les annĂ©es 1960, deux jeunes filles prĂ©nommĂ©es Marie font n’importe quoi. Dans ce deuxiĂšme long de Vera ChytilovĂĄ, seule femme de la Nouvelle Vague tchĂšque Milos Forman, Jiri Menzel, il s’agit de ruiner et de gĂącher le plus de choses possible la nourriture, les fĂȘtes, leur temps, les rendez-vous avec les hommes, les vĂȘtements. La figure nouvelle de la fofolle invente un burlesque politique intense – qu’on retrouve dans CĂ©line et Julie vont en bateau de Rivette. Les Petites Marguerites se place sous le signe de la dĂ©pense avec une grande Ă©conomie de moyens, cherchant Ă  exprimer de la façon la plus condensĂ©e et littĂ©rale l’envie de tout casser, dont le film lui-mĂȘme. L. C. Avec Jitka CerhovĂĄ, Ivana KarbanovĂĄ, Julius Albert Tch., 1 h 14 1967 / Portrait of Jason de Shirley Clarke C’est un film sur le spectacle de soi. C’est un exercice de confession. C’est une odyssĂ©e de l’échec. Et c’est quasiment du stand-up. Jason Holliday, combinaison de toutes les marginalitĂ©s possibles de l’AmĂ©rique des sixties il est noir, homosexuel, call-boy, prostituĂ©, fait face Ă  la camĂ©ra de Shirley Clarke qui, hors champ et accompagnĂ©e d’un certain Carl, lui demande de raconter sa vie. Pendant toute une nuit, il se donne en spectacle, tour Ă  tour fascinant et agaçant. “ArrĂȘte de rire Jason ! Parle-nous de toi ! Ta mĂšre, ton enfance, les hommes que tu as aimĂ©s
” Jamais un exercice de portrait au cinĂ©ma ne s’est Ă  ce point construit sur une lutte, opposant brutalement jusqu’à l’insulte le sujet filmĂ© et le ou la cinĂ©aste. RythmĂ© par les “I’ll never tell” de Jason, le film oppose la rĂ©alisatrice Ă  une carapace de gaĂźtĂ© qu’elle et son compagnon encore plus violent ne parviennent jamais vraiment Ă  percer. En filigrane, Portrait of Jason traduit Ă©galement une authentique haine d’Hollywood, qui s’exprime dans le corps mĂȘme de Jason il incarne la limite du show, une surface euphorique dĂ©truite de l’intĂ©rieur. Ce n’est pas anodin que Shirley Clarke, tĂȘte de file avec Jonas Mekas de l’underground new-yorkais des annĂ©es 1960, dĂ©cide de filmer un tel dĂ©raillement du spectacle. J. T. Avec Jason Holliday et les voix de Shirley Clarke et Carl Lee 1 h 45 1969 / La fiancĂ©e du Pirate de Nelly Kaplan AprĂšs la mort de sa mĂšre avec qui elle vivait dans la pauvretĂ© et en rĂ©action Ă  l’indiffĂ©rence des hommes de pouvoir locaux, une jeune femme d’un petit village dĂ©cide de se prostituer et finit par semer Ă  la zizanie, dĂ©voilant l’impunitĂ© et la violence d’un systĂšme. Bernadette Lafont incarne Marie dans ce manifeste fĂ©ministe et bordĂ©lique de la fin des sixties, Ă  la portĂ©e toujours rageuse cinquante et un ans plus tard. Venue d’Argentine, la rĂ©alisatrice Nelly Kaplan, longtemps proche d’Abel Gance et d’AndrĂ© Breton, a rĂ©alisĂ© plusieurs autres films aprĂšs son brillant coup d’essai, puis beaucoup Ă©crit pour la tĂ©lĂ©vision. Avec Bernadette Lafont, Georges GĂ©ret, Michel Constantin Fr, 1h43 1970 / Wanda de Barbara Loden La puissance de la premiĂšre et unique rĂ©alisation de Barbara Loden tient tout entiĂšre dans cette phrase de Marguerite Duras Ă  son sujet “Je considĂšre qu’il y a un miracle Wanda. D’habitude, il y a une distance entre la reprĂ©sentation et le texte, entre le sujet et l’action. Ici, cette distance est complĂštement annulĂ©e, il y a une coĂŻncidence immĂ©diate entre Barbara Loden et son sujet.” Ou comment l’épouse sous-estimĂ©e d’un cinĂ©aste cĂ©lĂšbre, Elia Kazan, se projeta dans la figure d’une mĂšre de famille en rupture de ban, transformant un fait divers en Ă©popĂ©e subjective et quasi documentaire chevillĂ©e au corps de l’actrice-rĂ©alisatrice. Ayant coĂ»tĂ© six ans de sa vie Ă  Loden, qui peina Ă  rĂ©unir un budget pourtant modeste 200 000 dollars, Wanda, sorti en 1970 mais peu visible en France avant 2003, est passĂ© en quelques dĂ©cennies de statut d’Ɠuvre oubliĂ©e Ă  celui de film culte, oĂč la rĂ©pression sociale des femmes atteint des sommets de mĂ©lancolie nihiliste. E. B. Avec Barbara Loden, Michael Higgins 1 h 42 1971 / Les Longs Adieux de Kira Muratova CinĂ©aste rare, d’origine ukrainienne mais travaillant avec difficultĂ© dans le systĂšme soviĂ©tique, Kira Muratova signe, avec Les Longs Adieux, un exceptionnel deuxiĂšme long-mĂ©trage. RĂ©alisĂ© en 1971, mais dĂ©couvert seulement Ă  la fin des annĂ©es 1980, Ă  la faveur de la perestroĂŻka, ce film radiographie les relations mouvantes et conflictuelles entre une mĂšre et son fils, Ă  peine sorti de l’adolescence. La texture de la mise en scĂšne, flottante au meilleur sens du terme mais aussi d’une virtuositĂ© Ă©blouissante, entraĂźne le film vers des rivages discrĂštement oniriques. Dans un noir et blanc splendide mais jamais ostentatoire, c’est tout un monde qui ressurgit devant nous. Le monde Ă©tincelant de Kira Muratova, grande cinĂ©aste qui transcende les clivages genrĂ©s, qu’il faut encore et encore redĂ©couvrir. T. J. Avec Zinaida Sharko, Oleg Vladimirsky Union Sov., 1 h 37 1972 / Nathalie Granger de Marguerite Duras En 1972, Duras a dĂ©jĂ  rĂ©alisĂ© trois films La Musica, DĂ©truire, dit-elle et Jaune le soleil. Pour Nathalie Granger, elle installe chez elle, dans sa maison de Neauphle, une demi-douzaine de personnes, dont Lucia BosĂš et Jeanne Moreau. Toutes deux furent des Ă©gĂ©ries antonioniennes, et quelque chose des dĂ©ambulations hagardes du cinĂ©aste se prolonge dans ces errements de deux femmes dans la gĂ©ographie d’une maison dont le sol en damier n’est pas sans Ă©voquer La Nuit. Lucia BosĂš est la mĂšre d’une petite fille de 8 ans, Nathalie Granger, que son Ă©cole juge trop violente pour poursuivre sa scolaritĂ©. La radio annonce au dĂ©but du film que deux adolescents criminels, aprĂšs avoir abattu un garagiste, sont en cavale dans la forĂȘt voisine. Les deux femmes ont peur, elles attendent. Qu’attendent ces femmes, sinon que la violence qui gronde dehors, qui germe dans le comportement inquiĂ©tant de la petite Nathalie vienne tout dĂ©vaster dans leur maison ? Ici, la violence est toujours en puissance. L’action aussi. La maison, comme le cinĂ©ma de Duras, est un trou noir. Toute forme de rĂ©cit, d’évĂ©nement, la possibilitĂ© mĂȘme de la reprĂ©sentation s’y dĂ©matĂ©rialisent. DĂ©jĂ  les miroirs capturent les corps et s’y substituent. DĂ©jĂ  la voix des comĂ©diens ne provient plus du cadre, mais plutĂŽt du hors-champ trois ans plus tard, la cinĂ©aste systĂ©matise le procĂ©dĂ© pour son film le plus cĂ©lĂšbre, India Song. Duras n’en est qu’à la mise en place de son opĂ©ration de dĂ©membrement du cinĂ©ma. LĂ  aussi, un grand geste de rupture donc de violence se dessine, mais reste en puissance, et trouvera des actualisations de plus en plus fortes jusqu’à l’écran noir, neuf ans plus tard, de L’Homme atlantique. C’est ce qui rend Nathalie Granger aussi beau. C’est un film de suspension, juste au bord du vide, mais sans s’y jeter. Un film qui attend, l’éternitĂ© Ă  ses cĂŽtĂ©s. L. Avec Jeanne Moreau, Lucia BosĂš, GĂ©rard Depardieu Fr., 1 h 25 1972 / Mimi mĂ©tallo blessĂ© dans son honneur de Lina WertmĂŒller Lina WertmĂŒller nĂ©e en 1928, fille rebelle de la bourgeoisie romaine, fut l’assistante de Fellini notamment sur 8 1/2 avant de passer Ă  la rĂ©alisation dans les annĂ©es 1960-70 avec une palanquĂ©e de comĂ©dies dont Mimi mĂ©tallo blessĂ© dans son honneur est le point d’orgue. Rendre grotesques et pathĂ©tiques tant les codes d’honneur de la Mafia sicilienne que le machisme ambiant, il fallait oser, et WertmĂŒller s’adonne Ă  cette satire dans une mixture rĂ©jouissante d’anarchisme et de bras d’honneur. Mimi mĂ©tallo valut Ă  WertmĂŒller une notoriĂ©tĂ© internationale qui profita Ă  Giancarlo Giannini, son acteur fĂ©tiche. G. L. Avec Giancarlo Giannini, Mariangela Melato It., 2 h 01 1974 / Je, tu, il, elle de Chantal Akerman Une annĂ©e avant le chef-d’Ɠuvre akermanien Jeanne Dielman, la jeune cinĂ©aste belge, pour son premier long-mĂ©trage de fiction, se met en scĂšne comme hĂ©roĂŻne quasiment mutique dĂ©couvrant sa subjectivitĂ© en arrĂȘtant de se nourrir, Ă  part un peu de sucre, et en se mettant Ă  l’écriture. La sĂ©quence qui reste collĂ©e Ă  notre rĂ©tine est celle d’une longue scĂšne de sexe entre deux jeunes femmes. La camĂ©ra est au niveau du lit, Ă  environ un mĂštre de distance, assez loin pour capter la chorĂ©graphie de l’enchevĂȘtrement des corps, et assez prĂšs pour ĂȘtre bouleversĂ©e par ce rapport qui sort de tous les codes. Pendant la sĂ©quence suivante, l’amante de Julie disparaĂźt entre ses cuisses pendant de longues minutes. On n’entend et on ne voit pas Julie jouir, le plan se termine arbitrairement comme si l’orgasme n’était pas une fin en soi. La jouissance fĂ©minine n’est pas contenue, elle dĂ©borde, elle ne s’arrĂȘte pas. I. B. Avec Chantal Akerman, Nils Arestrup Bel., Fr., 1 h 30 1974 / Portier de nuit de Liliana Cavani Dans un hĂŽtel de Vienne, une ancienne dĂ©portĂ©e retrouve son bourreau, un ex-officier SS devenu portier de nuit, et renoue avec lui une liaison morbide. Planant et hypnotique, cette passion dĂ©vorante a fait scandale Ă  sa sortie, provoquant ainsi son interdiction en Italie et son classement X aux Etats-Unis. Ce film bien ancrĂ© dans son Ă©poque seventies, a fait de Liliana Cavani l’une des premiĂšres rĂ©alisatrices italienne Ă  s’inscrire dans la gĂ©nĂ©ration de cinĂ©astes postĂ©rieure aux NĂ©orĂ©alistes. Dans un style RomĂ©o et Juliette teintĂ© de sadomasochisme, la cinĂ©aste puise dans son travail documentaire rĂ©alisĂ© en 1963 Ă  propos des femmes dans la RĂ©sistance. Avec Dirk Bogarde, Charlotte Rampling, Philippe Leroy-Beaulieu Italie, 1h58 1975 / Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles de Chantal Akerman “Une nuit, j’étais dans mon lit en train de somnoler et tout Ă  coup, j’ai vu le film.” C’est ainsi que Chantal Akerman raconte la genĂšse de Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles. Un flash foudroyant surgi Ă  la bordure du somme, une forme qui se dĂ©cante sur fond de relĂąchement de la conscience, une pure vision qui transperce la nuit c’est tout cela Jeanne Dielman, un film proprement inimaginable, une Ɠuvre tellement immense qu’elle excĂšde tout autour d’elle Ă  commencer par l’Ɠuvre Ă  venir de son autrice, alors ĂągĂ©e de 25 ans. Jeanne Dielman Delphine Seyrig, sublime Ă  jamais est une veuve entre deux Ăąges, qui vit Ă  Bruxelles, avec son fils de 17 ans. Le film dĂ©crit une cinquantaine d’heures du quotidien de cette femme, dont la vie s’organise comme un ballet mĂ©canique de gestes domestiques. Jeanne Dielman fait la cuisine, met la table, sert son fils, dĂźne, dĂ©barrasse la table, fait la vaisselle, range la cuisine. Jeanne Dielman dĂ©fait son lit, s’endort, refait son lit, se lave mĂ©thodiquement dans sa baignoire, s’habille, cire les chaussures de son fils. Et cela ad libitum, rien de moins que trois heures vingt. Il suffisait de filmer ces actions dans une durĂ©e proche du temps rĂ©el pour enregistrer quelque chose de jamais vu une construction sociale – la femme au foyer – qui ne tolĂšre aucune extĂ©rioritĂ©, une aliĂ©nation consentie qui, si on en dĂ©rĂšgle les procĂ©dures, aboutit Ă  une catastrophe. A partir de ce qui constitue le dĂ©chet du cinĂ©ma classique l’hyper-quotidiennetĂ©, l’addition des temps morts, le film invente une forme d’une stylisation inouĂŻe, aux antipodes du naturalisme, qui ne cessera de dĂ©poser dans tout le cinĂ©ma mondial ses germes d’extrĂȘme rigueur, de construction en boucles rĂ©pĂ©titives et d’étrangetĂ© ritualisĂ©e de Tsai Ming-liang Ă  Gus Van Sant, de Michael Haneke Ă  Kelly Reichardt. En regardant ce qu’on ne regardait pas, Chantal Akerman a aussi, Ă  jamais, changĂ© la façon de regarder. L. Avec Delphine Seyrig Bel., 3 h 18 1975 / AloĂŻse de Liliane de Kermadec Film rare, AloĂŻse est l’Ɠuvre la plus connue de Liliane de Kermadec, rĂ©alisatrice française dĂ©cĂ©dĂ©e le mois dernier. Il retrace la vie de la suissesse AloĂŻse Corbaz. Cette femme internĂ©e en asile psychiatrique peignit toute sa vie des tableaux reprĂ©sentants les princes et les princesses qui peuplaient son imaginaire. Figure emblĂ©matique de l’art brute, elle est interprĂ©tĂ©e par Delphine Seyrig, qui poursuit ici le projet de toute une carriĂšre jalonnĂ©e de rĂŽles profondĂ©ment fĂ©ministes. Co-scĂ©narisĂ© par AndrĂ© TĂ©chinĂ©, AloĂŻse est aussi l’un des premiers rĂŽles d’Isabelle Huppert, qui joue le jeune AloĂŻse et qui recevra pour ce film sa toute premiĂšre nomination aux CĂ©sar. Avec Caroline Huppert, Hans Verner, Nita Klein Fr, 1h55 1976 / Sois belle et tais-toi de Delphine Seyrig En 1976, Delphine Seyrig prend la camĂ©ra avec son amie Carole Roussopoulos au cadre pour rendre la parole. Le film se compose de vingt-trois entretiens avec des actrices de diffĂ©rents pays, de notoriĂ©tĂ©s diverses, de Jane Fonda Ă  Maria Schneider, qui commentent l’ordinaire des violences sexistes auxquelles les confronte leur travail. Dans sa forme brute plans longs et frontaux, rugueuse noir et blanc et gros grain, le film enregistre impeccablement ce qu’on n’appelait pas encore, mais qui advient avec une puissance inouĂŻe, la libĂ©ration d’une parole. L. Avec Jane Fonda, Juliet Berto, Maria Schneider, Ellen Burstyn Fr., 1 h 51 1976 / News from home de Chantal Akerman Les personnages akermaniens sont presque toujours aux prises avec un dispositif d’enfermement. Un an aprĂšs l’appartement sans dehors de Jeanne Dielman, la cinĂ©aste parle d’une fuite avortĂ©e. Partie vivre quelques annĂ©es Ă  New York, Chantal Akerman filme la ville Ă  la frontiĂšre de la nuit et du jour, lorsque les rues sont dĂ©peuplĂ©es, que les premiĂšres lueurs diurnes pointent, que l’espĂšce humaine tout entiĂšre est ensommeillĂ©e. Sauf l’autrice, insomniaque toujours en veille. Chantal Ă©grenne sur la bande-son la lecture des lettres que lui envoie sa mĂšre. Des lettres qui disent le manque, la solitude, l’inquiĂ©tude. Des lettres culpabilisantes qui opĂšrent comme un chant de sirĂšne et ramĂšnent vers le dedans, le giron, la fille envolĂ©e dehors. Le dernier plan, inoubliable, voit la skyline de Manhattan disparaĂźtre dans les brumes, comme un dehors dĂ©jĂ  perdu. Rarement un film aussi conceptuel une succession de plans de buildings aura Ă©tĂ© si peu aride et si Ă©mouvant. 1976 / Mikey and Nicky d’Elaine May En 1970, John Cassavetes Ă©rige un monument Ă  la gloire de l’amitiĂ© masculine, ses beuveries, sa lassitude, sa tristesse et ses joies Husbands. En 1975, l’actrice, scĂ©nariste et cinĂ©aste Elaine May poursuit malicieusement le geste de Cassavetes et ausculte l’amitiĂ© fatiguĂ©e de Mikey et Nicky, incarnĂ©s par Falk et Cassavetes qui se laissent aller Ă  leur tour prĂ©fĂ©rĂ© vivre devant une camĂ©ra. La trame mafieuse n’est lĂ  que pour servir de prĂ©texte Ă  capter l’errance de deux hommes obligĂ©s de se souder, se sauver l’un l’autre. Le duo fait ce qu’on attend de lui boire, fumer, divaguer, philosopher dans un cimetiĂšre ou se rendre chez une prostituĂ©e, se trahir aussi. Etrangement, le film de May Ă©prouve une sympathie infinie pour ses personnages masculins, le regard se fait un peu moins puissant et empathique lorsqu’il s’agit de faire vivre ses personnages fĂ©minins. Si l’on ignore qu’une femme se trouve derriĂšre la camĂ©ra, il est impossible de le deviner. Un cas passionnant. M. J. Avec John Cassavetes, Peter Falk 1 h 59 1976 / Harlan County USA de Barbara Kopple Barbara Kopple nĂ©e en 1947 fait son apprentissage de cinĂ©aste auprĂšs des documentaristes Albert et David Maysles. Au dĂ©but des annĂ©es 1970, elle est la monteuse de Winter Soldier, enquĂȘte sur les vĂ©tĂ©rans du Vietnam. En 1973, elle filme pendant plus d’un an la grĂšve des mineurs de Brookside, dans le comtĂ© de Harlan Kentucky. Harlan County USA sort en 1976 et fait grand bruit jusqu’à rĂ©colter un Oscar. Immersion et empathie, du cĂŽtĂ© des damnĂ©s de la mine, sans contrepoint syndicats, patrons censĂ©ment objectif et consensuel. Un documentaire formidablement engagĂ© qui privilĂ©gie le rĂŽle majeur des femmes dans la grĂšve. G. L. Avec Norman Yarborough, Houston Elmore 1 h 43 1976 / L’Honneur perdu de Katharina Blum de Margarethe von Trotta D’aprĂšs le roman Ă©ponyme de Heinrich Böll, L’Honneur perdu de Katharina Blum fut corĂ©alisĂ© en 1975 par Volker Schlöndorff et son Ă©pouse d’alors, Margarethe von Trotta. Dans ce duo, il est facile de dĂ©tecter un regard singuliĂšrement fĂ©minin. Ne serait-ce que parce que le film est le portait d’une femme, Katharina, gouvernante chez un avocat. Une femme sans histoires, jusqu’à sa rencontre avec un inconnu qui va se rĂ©vĂ©ler ĂȘtre un criminel en fuite. La police arrĂȘte Katharina comme complice prĂ©sumĂ©e. DĂšs lors la presse Ă  scandale s’empare de sa vie et la dĂ©truit. Autre touche fĂ©minine majeur, l’incarnation, plus que l’interprĂ©tation, du rĂŽle de Katharina par Angela Winkler, lĂ©gende vivante du théùtre dirigĂ©e entre autres par Peter Zadek ou Thomas Ostermeier et du cinĂ©ma allemand ScĂšnes de chasse en BaviĂšre de Peter Fleischmann, Le Tambour de Volker Schlöndorff, Benny’s video de Michael Haneke ou, plus rĂ©cemment, Sils Maria d’Olivier Assayas. Corps et Ăąme, Angela Winkler est Katharina Blum Honneur perdu d’une femme rĂ©signĂ©e, honneur retrouvĂ© d’une femme rĂ©voltĂ©e. Avec Angela Winkler, Mario Adorf, JĂŒrgen Prochnow Allemand, 1h45 1977 / Le camion de Marguerite Duras “Ca aurait Ă©tĂ© une route, au bord de la mer. Elle aurait traversĂ© un grand plateau nu. Et un grand camion serait arrivĂ© et aurait traversĂ© la plaine”. C’est Marguerite Duras qui parle de son film, mais Ă  l’intĂ©rieur de son film. En voix off. Une voix off simplement dĂ©notative, qui ne dit rien de plus que ce qu’on voit des plans d’un camion qui en effet roule au travers d’une plaine. Mais qui peu Ă  peu se dĂ©colle de l’image, la peuple de personnages, d’histoires qu’elle ne comprend pas, parle d’une femme ramassĂ©e sur la route qui Ă©voque l’épuisement de la lutte des classes, de l’obscurcissement du langage et psalmodie une seule phrase “Que le monde aille Ă  sa perte”. Peu Ă  peu il n’y a mĂȘme plus de camion Ă  l’image. Juste Marguerite Duras qui lit le texte face Ă  GĂ©rard Depardieu. “C’est un film ?” demande Depardieu avec la prudence d’un collĂ©gien qui oserait prendre la parole durant la classe d’un professeur sĂ©vĂšre. “Ça aurait Ă©tĂ© un film !” rĂ©pond, dĂ©finitive, la cinĂ©aste. PlutĂŽt que de commenter Le camion, de disserter sans fin sur la dĂ©construction de toutes les composantes du cinĂ©ma reprĂ©sentatif que le film opĂšre, on a envie de se laisser la joie de le dĂ©crire. DĂ©crire ce que nous voyons quand sur l’écran Duras dĂ©crit ce que nous ne voyons pas. Le camion est le plus beau film descriptig de l’histoire du cinĂ©ma. Ce qu’il nous dit de ses voix off, c’est que filmer n’est rien sinon dĂ©crire et que dĂ©crire, c’est Ă©crire. DĂ©crire, dit-elle. Avec Gerard Depardieu Fr, 1h20 1979 / Simone BarbĂšs ou la Vertu de Marie-Claude Treilhou Simone BarbĂšs traverse sa nuit entiĂšre au beau milieu d’une dĂ©bauche anodine, vĂ©cue et quotidienne, vraiment dĂ©barrassĂ©e du scandale – du monde mĂąle d’un cinĂ© porno oĂč elle est ouvreuse Ă  la boĂźte lesbienne, espaces irrĂ©conciliables mais qui ne valent pas mieux l’un que l’autre, et dont on s’échappe pour l’aube, dans la voiture d’un inconnu. Dans Simone BarbĂšs
, la pornographie reste hors cadre et dans l’entrĂ©e, bande sonore cocasse et grave, comme commentaire de la lutte des sexes. Mais le sexe est la fausse vĂ©ritĂ© des corps, et la vertu, pour souhaitable qu’elle reste, n’a rien Ă  voir avec tout ça c’est tenir bon et parler vrai, missions infinies, impossibles. C’est pourquoi le film allie le pathĂ©tique et l’oblique, oĂč le pathos du vĂ©cu, qu’exprime la frontalitĂ© des plans plaquĂ©e sur la fatigue des corps, est sans cesse inflĂ©chi et traversĂ© par la diagonale du ton ou du sens, toujours penchĂ©, faussĂ©, un peu charade insaisissable, ma parole. L’ouvreuse Treilhou, entrant au cinĂ©ma, a frayĂ© et atteint, du premier coup, tout ce qui ne se dit pas. L. C. Avec Ingrid Bourgoin, Michel Delahaye Fr., 1 h 25 1980 / Allemagne mĂšre blafarde d’Helma Sanders-Brahms Helma Sanders-Brahms 1940-2014 est l’une des rares femmes du mouvement labĂ©lisĂ©, dans les annĂ©es 1970, “nouveau cinĂ©ma allemand”. Elle y trouve sa place Ă  part entiĂšre en 1980 avec Allemagne mĂšre blafarde. Dans l’Allemagne de la dĂ©faite nazie et de la reconstruction, le film chronique la survie de Lene Eva Mattes, mĂšre courage le titre du film est empruntĂ© Ă  un poĂšme de Brecht d’une jeune Anna. Exodes, souffrances et destructions. Le regard est quasi documentaire mais il instruit surtout le destin d’une femme “cĂ©libataire” face au grand chambardement de l’histoire. Un regard sombre, tant sur le passĂ© que sur le prĂ©sent de l’Allemagne qui, en 1980, sortait Ă  peine du trauma terroriste incarnĂ© par les membres du groupe Baader-Meinhof. C’est la puissance et l’intelligence du film le nazisme et sa ruine n’y sont pas seulement envisagĂ©s comme une Ă©pouvante, mais aussi comme une “chance” pour Lene qui profite de la dĂ©bĂącle gĂ©nĂ©ralisĂ©e pour s’affranchir du joug conjugal et patriarcal. Si catastrophe il y a, elle se cache au final sous le masque du retour au foyer oĂč le dĂ©ni des crimes commis durant la guerre et le machisme de son mari retrouvĂ© figent le visage de l’hĂ©roĂŻne en une inquiĂ©tante paralysie faciale. G. L. Avec Eva Mattes, Ernst Jacobi All., 2 h 03 1981 / The Decline of Western Civilization de Penelope Spheeris Deux choses expliquent la longue fascination qu’a toujours inspirĂ©e The Decline of Western Civilization. La premiĂšre tient Ă  son affiche, qui Ă©tait aussi la pochette de l’album qui fit la rĂ©putation de ce documentaire brutal sur la scĂšne punk Ă  Los Angeles, sorti en 1981. On y voyait Darby Crash, des Germs, allongĂ©, les yeux clos. Une affiche conçue Ă  l’automne 1980, peu de temps avant que le chanteur ne se suicide en s’injectant une surdose d’hĂ©roĂŻne, Ă  22 ans – le 7 dĂ©cembre 1980, la veille de l’assassinat de John Lennon. De fait, les moments concernant les Germs sont les plus stupĂ©fiants du film, parce que le groupe Ă©tait sur scĂšne l’incarnation du chaos bannis de quasiment tous les clubs, et The Decline
 est un film Ă  75 % constituĂ© de scĂšnes live, mais voir Darby et sa copine dĂ©crire les photos qu’ils ont shootĂ©es avec des amis autour du cadavre d’un peintre mort d’une crise cardiaque au rez-de-chaussĂ©e de leur appart est le rĂ©sumĂ© nihiliste d’un mouvement nĂ© de l’ennui dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© des banlieues amĂ©ricaines. La grande spĂ©cificitĂ© de ce documentaire est surtout de montrer Ă  quel point cette scĂšne, aussi violente soit-elle, Ă©tait emmenĂ©e par une poignĂ©e de filles intelligentes et vĂ©nĂšres Exene Cervenka de X, Alice Bag des Bags, plus une moitiĂ© des Germs, jusqu’à la journaliste Melanie Nissen, du lĂ©gendaire fanzine Slash. En aurait-il Ă©tĂ© ainsi si The Decline... n’avait pas Ă©tĂ© l’Ɠuvre d’une rĂ©alisatrice ? Soit l’incroyable Penelope Spheeris, fille d’un immigrĂ© grec, forain, assassinĂ© quand elle avait 9 ans, ayant grandi dans des mobile homes, parmi les trailer trash, cette sous-population fauchĂ©e qui habite les trailer parks. La base mĂȘme de l’exclusion sociale qui fait l’ADN du punk, elle connaĂźt. Aussi le punk-rock est partout dans les films suivants, que ce soit Suburbia 1984, The Boys Next Door 1985, avec Charlie Sheen ou mĂȘme Wayne’s World, son tube de 1992 avec Mike Myers. Cette maverick est par ailleurs la cousine du cinĂ©aste Costa-Gavras. P. A. Avec Alice Bag, Black Flag 1981 / Neige de Juliet Berto Pour son premier film corĂ©alisĂ© en 1981 avec son compagnon Jean-Henri Roger, Juliet Berto, actrice nouvelle vague Godard, Rivette, a choisi le titre Neige par goĂ»t d’un jeu entre les mots la neige dĂ©signe plus ici le nom de code de la drogue dure hĂ©roĂŻne, cocaĂŻne qu’un phĂ©nomĂšne mĂ©tĂ©o. Entre la place Blanche autre nom Ă  tiroir et Pigalle, Anita Juliet Berto, barmaid, se dĂ©mĂšne entre toxicos, flics, dealers et divers marginaux. Dans ce film noctambule, la lumiĂšre fait rage, captĂ©e dans ses clairs-obscurs par le directeur de la photographie William Lubtchansky. On parla Ă  l’époque de rĂ©alisme poĂ©tique. On pourrait aujourd’hui parler de rĂ©alisme tout court, tant Neige apparaĂźt comme un quasi documentaire sur un underground parisien disparu, mais gorgĂ© d’une tendresse, toujours d’actualitĂ©, pour les moins que rien. Et puis LA Berto, telle qu’elle fut chantĂ©e par Yves Simon Belle et opalescente, partie Ă  jamais en 1990 “au pays des merveilles de Juliet.” Avec Jean-François StĂ©venin, Juliet Berto, Robert Liensol Fr, 1h30 1 h 41 1981 / Freak Orlando d’Ulrike Ottinger Contemporaine mais dissidente du nouveau cinĂ©ma allemand des annĂ©es 1970, croisant nĂ©anmoins le travail de Werner Schroeter avec qui elle partage une Ă©gĂ©rie, lesbienne militante, Magdalena Montezuma, et une certaine exubĂ©rance lyrique, Ulrike Ottinger a construit l’une des Ɠuvres les plus dĂ©bridĂ©es et folles du cinĂ©ma mondial. Bouffonnerie carnavalesque oĂč trĂŽne, impĂ©riale, Delphine Seyrig, Freak Orlando porte au sommet le style convulsif et strident de la cinĂ©aste. L. Avec Magdalena Montezuma, Delphine Seyrig, Albert Heins All. de l’O., 2 h 06 1982 / Boat People d’Ann Hui La Hong-Kongaise Ann Hui nĂ©e en 1947, l’une des rares femmes cinĂ©astes de son pays, surgit en 1982 au Festival de Cannes avec Boat People. Titre international trompeur l’original se nomme Passeport pour l’enfer, car cette fiction ne dĂ©crit pas l’exode des Vietnamiens mais la situation du pays dans les annĂ©es qui suivirent le retrait des troupes amĂ©ricaines. S’appuyant sur des entretiens avec des rĂ©fugiĂ©s vietnamiens, collectĂ©s pour un documentaire tĂ©lĂ© rĂ©alisĂ© en 1979, Boat People, sans pathos Ă  sensation, dĂ©crit l’arriĂšre-monde d’une situation politique et Ă©conomique catastrophique dictature et famine. G. L. Avec George Lam, Cora Miao 1 h 49 1983 / Rue Cases-NĂšgres d’Euzhan Palcy AdaptĂ© du roman autobiographique de Joseph Zobel publiĂ© en 1950, Rue Cases-NĂšgres nous plonge dans le contexte du gouvernorat des annĂ©es 1930 de la Martinique. Dans un milieu agricole, JosĂ©, 11 ans, orphelin Ă©levĂ© par sa grand-mĂšre, travaille dans des champs de canne Ă  sucre mais aspire Ă  une Ă©ducation. A travers cette réécriture fidĂšle, la Martiniquaise Euzhan Palcy scrute une sociĂ©tĂ© oĂč l’esclavagisme aboli a laissĂ© des traces profondes. Elle obtient, en 1983, le Lion d’argent du meilleur premier film Ă  la Mostra de Venise et est la premiĂšre femme Ă  recevoir le CĂ©sar, l’annĂ©e d’aprĂšs, de la meilleure premiĂšre Ɠuvre. F. C. Avec Darling LĂ©gitimus, Douta Seck Fr., 1 h 40 1985 / Sans toit ni loi d’AgnĂšs Varda Le cinĂ©ma expressif d’AgnĂšs Varda trouve en 1985 sa grĂące la plus entiĂšre en accompagnant sur la route une fille sale et libre, Sandrine Bonnaire, qui n’avait pas 18 ans. Sans toit ni loi restaurĂ© continue d’appartenir au genre des films parfaits. Et Varda d’ĂȘtre, parmi ceux qui commencĂšrent Ă  la fin des annĂ©es 50 Ă  transformer la visĂ©e du cinĂ©ma, celle qui cherche la maĂźtrise de l’expressivitĂ© inventer des formes qui transmettent directement, plastiquement, le sens d’une expĂ©rience humaine. Or elle le fait en peignant le trajet d’un personnage qui reste mystĂ©rieux prĂ©sente et illisible par tous. C’est qu’il n’y a rien Ă  lire que cette prĂ©sence et les lieux qu’elle traverse, toute interprĂ©tation de sa vie par ceux qui la croisent Ă©quivalant au malaise de la “sociĂ©tĂ©â€ devant ces deux valeurs asociales libertĂ©, saletĂ©. Le destin de Mona, c’est la pure expressivitĂ© sans loi, sans langage. Avec Sandrine Bonnaire, Macha MĂ©ril, StĂ©phane Freiss Fr, 1h45 1985 / Recherche Susan dĂ©sespĂ©rĂ©ment de Susan Seidelman De toutes les tentatives cinĂ©matographiques de Madonna, la premiĂšre fut la meilleure, avec cette aventure sautillante dans le New York du milieu des annĂ©es 80, oĂč deux femmes Madonna, en petite dĂ©linquante sortie de prison, Rosanna Arquette en femme au foyer dĂ©sespĂ©rĂ©e façonnent leur Ă©mancipation au son d’Into The Groove. La rĂ©alisatrice Susan Seidelman s’est inspirĂ©e notamment du grand film seventies de Jacques Rivette, CĂ©line et Julie vont en bateau. Elle avait auparavant mis en scĂšne un premier long-mĂ©trage culte sur les annĂ©es post-punk, Smithereens 1982, avec l’iconique Richard Hell du groupe Television et une bande-son des Feelies – Ă  la clef, une sĂ©lection cannoise en compĂ©tition. Seidelman se dĂ©marquera plus tard en rĂ©alisant plusieurs films comme Cookie, en 1989, co-Ă©crit par Nora Ephron, mais Ă©galement dans les sĂ©ries, dirigeant notamment le pilote de Sex And The City en 1998. Avec Rosanna Arquette, Madonna, Aidan Quinn AmĂ©ricain, 1h44 1986 / Sleepwalk de Sara Driver Production de la nouvelle Ă©cole indĂ©pendante new-yorkaise, Sleepwalk suit le personnage de Nicole, une jeune claviste dans une imprimerie qui va traduire un mystĂ©rieux manuscrit chinois Ă  la demande de deux personnages menaçants. Le livre, qui se prĂ©sente d’abord comme un conte, sera bientĂŽt le dĂ©clencheur d’évĂšnements des plus Ă©tranges. Sara Driver, en suivant l’errance de son hĂ©roĂŻne et ses rencontres tant incroyables que terrifiantes, absorbe les influences – du clair-obscur au surrĂ©alisme en passant par le performance art – et les utilise au service de son propre style vibrant et singulier. Avec Suzanne Fletcher, Ann Magnuson, Dexter Lee AmĂ©ricain, 1h20 1988 / 36 fillette de Catherine Breillat “Contre le monde, contre la vie” aurait pu ĂȘtre l’autre titre de 36 fillette, qui suit Ă  la trace son hĂ©roĂŻne, Lili, 14 ans, bloc de colĂšre et de dĂ©goĂ»t, l’envers d’un dĂ©sir qui la dĂ©borde et frappe d’inanitĂ© tout ce qui l’entoure sa famille, son milieu, ses vacances. Breillat marche sur les traces d’un de ses films fĂ©tiches Baby Doll de Kazan 1956, surnom d’une femme-enfant qui, sous ses airs mutins, cache une bombe de sensualitĂ© dĂ©goupillĂ©e au milieu des hommes. La cinĂ©aste reprend le canevas mais dĂ©cuple l’érotisme, la transgression, la noirceur. Lili rencontre un quadragĂ©naire play-boy, vulgaire, les huis clos s’enchaĂźnent comme Ă  l’intĂ©rieur d’une scĂšne mentale et on ne sait plus vraiment qui est le chat, qui est la souris. Lili dĂ©couvre la voluptĂ© qu’il y a Ă  dire oui, puis Ă  se refuser, hĂ©siter. A mener un homme Ă  la baguette en soufflant le chaud et le froid. Grand film aussi sur la malĂ©diction des jeunes filles, obligĂ©es de penser leur sexualitĂ© en termes de puretĂ© et de souillure, alors qu’elles veulent seulement prendre leur pied. On ne remerciera jamais assez Breillat d’avoir filmĂ© des personnages qui brĂ»lent d’une passion purement sexuelle, d’avoir reconnectĂ© le dĂ©sir Ă  la cĂ©rĂ©bralitĂ©. M. J. Avec Delphine Zentout, Etienne Chicot, Jean-François StĂ©venin Fr., 1 h 26 1988 / Salaam Bombay de Mira Nair RĂ©compensĂ©e par la CamĂ©ra d’Or au Festival de Cannes en 1988, Salaam Bombay suit Krishna, un petit garon de dix ans abandonnĂ© Ă  Bombay, devenant Chaipu, porteur de thĂ© dans la rue, afin de rĂ©colter 500 roupies pour rentrer chez lui. Pour son premier long-mĂ©trage Ă  la frontiĂšre de la fiction et du documentaire, Mira Nair dĂ©laisse les studios de Bollywood, s’affranchit des codes traditionnels du cinĂ©ma populaire indien afin de plonger dans l’agitation de Bombay. La cinĂ©aste, diplĂŽmĂ©e en sociologie, parvient Ă  passer Ă  travers le piĂšge de l’apitoiement en signant un film immersif et mĂ©taphysique oĂč violence et sentiments s’entrechoquent, bref un film qui parle aussi de son temps. Avec Shafiq Syed, Irrfan Khan, Raghubir Yadav Indien, 1h53 1989 / Mon XXe siĂšcle d’IldikĂł Enyedi Mon XXe siĂšcle est un film de la hongroise IldikĂł Enyedi, qui emporta la CamĂ©ra d’Or du premier film en 1989 au festival de Cannes. C’est un rĂ©cit d’une fantaisie sidĂ©rante qui suture la prĂ©sentation de la premiĂšre ampoule Ă©lectrique par Edison le 31 dĂ©cembre 1879 dans le New Jersey, et la naissance le mĂȘme jour Ă  Budapest de jumelles, DĂłra et Lili. Devenues orphelines, les petites filles survivent en vendant des allumettes dans les rues, avant qu’un mystĂ©rieux kidnapping les sĂ©pare. La nuit du nouvel an 1900, DĂłra et Lili se retrouvent par hasard Ă  bord de l’Orient Express. DĂłra, madone des sleepings, un peu pute, un peu voleuse, et Lili, militante fĂ©ministe et anarchiste Qui est du cĂŽtĂ© de la lumiĂšre, qui est du cĂŽtĂ© de l’ombre ? IldikĂł Enyedi ne choisit surtout pas, suggĂ©rant que chacune Ă  leur fenĂȘtre, les deux hĂ©roĂŻnes hurlent la mĂȘme chose debout les femmes ! Et que la lumiĂšre soit, comme disait Edison
 Avec Dorota Segda, Oleg Yankovskiy, Paulus Manker Hongrois, 1h42 1990 / Paris Is Burning de Jennie Livingston Certains films ne vieillissent pas. Il arrive mĂȘme que le passage du temps leur offre une chambre d’écho avec leur prĂ©sent dont les dimensions ne cessent de s’étendre. Documentaire mythique sur la contre-culture ball new-yorkaise des annĂ©es 1980-90, Paris Is Burning anticipe un terme devenu central dans les luttes contemporaines l’intersectionnalitĂ© terme d’ailleurs inventĂ© quasi simultanĂ©ment Ă  la sortie du film, en 1989, par KimberlĂ© Crenshaw. Pendant six ans, Jennie Livingston a filmĂ© les concours de voguing et interrogĂ© leurs participants. Ce qu’elle cĂ©lĂšbre sans le savoir est une convergence des luttes oĂč se rejoignent en creux critiques de l’homophobie, de la transphobie, du racisme et problĂ©matiques liĂ©es Ă  la lutte des classes, au sida et Ă  la prostitution. Mais Paris Is Burning porte aussi en lui le germe d’une tendance qui se popularisera avec les rĂ©seaux sociaux encapsuler sa vie dans une reprĂ©sentation Ă©phĂ©mĂšre de soi qui prend l’apparence de la cĂ©lĂ©britĂ©. Il n’y a rien d’étonnant Ă  ce que le film connaisse un hĂ©ritage rĂ©cent avec la sĂ©rie Pose de Ryan Murphy ou Port Authority de Danielle Lessovitz 2019. Paris is still burning. B. D. Avec Brooke Xtravaganza, AndrĂ© Christian, Dorian Corey 1 h 11 1991 / Le Petit Homme de Jodie Foster Pour la plus française des actrices amĂ©ricaines, 1991 est une annĂ©e dĂ©cisive, marquĂ©e d’un cĂŽtĂ© par son rĂŽle lĂ©gendaire dans Le Silence des agneaux, et de l’autre par la sortie de son premier long-mĂ©trage. Portrait d’une femme simple confrontĂ©e Ă  la prĂ©cocitĂ© de son jeune fils, Le Petit Homme est un drame bouleversant dans lequel Foster, ĂągĂ©e alors de 29 ans, utilise son propre passĂ© d’enfant star pour Ă©clairer les thĂšmes du don et de la solitude, du lien complexe et ambivalent d’une mĂšre avec son petit garçon. Deux profils fĂ©minins s’y affrontent le premier portĂ© par un amour instinctif Foster, face Ă  une tutrice jouĂ©e par Dianne Wiest obsĂ©dĂ©e par la performance et l’ambition. Ses trois films suivants n’auront pas tout Ă  fait la mĂȘme grĂące. E. B. Avec Jodie Foster, Dianne Wiest 1 h 39 1991 / Border Line de DaniĂšle Dubroux Polar psychique idĂ©al, Border Line est l’histoire d’une idĂ©e fixe. Celle d’HĂ©lĂšne, une femme persuadĂ©e, contre toutes les apparences et toutes les rationalitĂ©s, que Julien, un jeune homme dont elle a trĂšs bien connu le pĂšre, est son fils. Passant de la nĂ©vrose Ă  la psychose, le personnage d’HĂ©lĂšne, interprĂ©tĂ© magistralement par DaniĂšle Dubroux en personne, nous embarque dans un drĂŽle de voyage qui navigue d’un rĂ©alisme apparent Ă  une maniĂšre de fantastique trĂšs personnel. Dans un style ligne claire, Dubroux projette une Ă©trange lumiĂšre sur le dĂ©sir de maternitĂ© et ses zones d’ombre, mais Ă©galement sur les fantasmes incestueux. Border Line est un geste rare, unique, dangereux, l’un de ces films qu’on aimerait tellement voir ressurgir surles Ă©crans. T. J. Avec David LĂ©otard, AndrĂ© Dussollier, Jacques Nollot Fr., Sui., 1 h 30 1992 / Nitrate Kisses de Barbara Hammer Dyketactics 1974, Multiple Orgasm 1976, Women I Love 1979
 Les films de Barbara Hammer – par ailleurs petite fille de l’actrice du cinĂ©ma muet Lilian Gish – dressent une cartographie pionniĂšre du cinĂ©ma lesbien, dont l’apogĂ©e s’est incarnĂ© dans son premier long mĂ©trage, rĂ©alisĂ© aprĂšs prĂšs de vingt ans de carriĂšre. MĂȘlant interviews, images d’archives et scĂšnes de sexe, l’important Nitrate Kisses est l’ouverture d’une trilogie consacrĂ©e aux luttes et sexualitĂ©s lesbiennes et gays, du point de vue des plus minorisĂ©es personnes racisĂ©es et ĂągĂ©es notamment. Admiratrice de Maya Deren, activiste infatigable, Hammer a passĂ© sa vie Ă  transmettre sa vision des puissances fĂ©minines comme on mettrait en lumiĂšre un continent cachĂ©. Elle est morte l’annĂ©e derniĂšre Ă  l’ñge de 79 ans. O. J. Avec Jerre, Maria, Ruth 1 h 07 1992 / Gas, Food, Lodging d’Allison Anders Focus sur trois femmes vibrantes perdues au fin fond d’un dĂ©sert poussiĂ©reux du Nouveau-Mexique. BasĂ© sur le roman Don’t Look and It Won’t Hurt de Richard Peck, le film, sorti en 1992, relate la vie houleuse d’une mĂšre cĂ©libataire et de ses deux adolescentes turbulentes. Si les relations des femmes aux hommes donnent au film ses tournants, le message principal rĂ©side avant tout dans le lien fĂ©minin. L’une des grandes rĂ©ussites de la cinĂ©aste Allison Anders est qu’elle touche Ă  toutes les bonnes questions des femmes de la classe ouvriĂšre contemporaine sans jamais ĂȘtre farouchement anti-hommes. Sans jamais effleurer le feuilleton romantique, Anders, toujours avec un style Ă©purĂ© et laconique, Ă©tudie en quelque sorte comment les femmes trouvent leur force intĂ©rieure, pleine de grĂące et d’espoir, afin de guĂ©rir leurs vieilles blessures. Avec Brooke Adams, Ione Skye, Fairuza Balk AmĂ©ricain, 1h41 1993 / La Leçon de piano de Jane Campion Au XIXe siĂšcle, la silhouette corsetĂ©e d’Ada dĂ©barque sur une plage de Nouvelle-ZĂ©lande. Sa fille et son piano l’accompagnent dans sa nouvelle vie d’épouse contrainte. Ada a perdu sa voix, elle ne communique qu’en touchant son piano et en plantant son regard charbonneux dans celui de ceux qui tentent de la dominer. La rencontre avec un homme de l’üle va lui redonner son corps. La camĂ©ra synesthĂ©sique de Jane Campion dĂ©borde de sensualitĂ©. Chaque geste d’Ada caresse l’écran de cinĂ©ma, Campion invente un langage amoureux avec une parole qui ne part pas du logos – le discours, la raison, la logique –, mais de la glossa – une langue liĂ©e au corps, Ă  la glotte, au corps caverneux de la bouche. Car mĂȘme si l’hĂ©roĂŻne n’émet pas le son de sa voix, son corps, lui, hurle Ă  chaque plan son dĂ©sir de libertĂ©. I. B. Avec Holly Hunter, Harvey Keitel Aust., Fr., 2 h 01 1993 / Travolta et Moi de Patricia Mazuy Le feu et la glace, une ado incendiaire qui fout le feu chez ses parents et un jeune homme patineur qui exĂ©cute des saltos avec grĂące, The Clash et Joe Dassin, le punk et la disco, l’embrasement sensuel de la pubertĂ© et le grand gel existentiel du dĂ©sir de mort pour son deuxiĂšme film, Patricia Mazuy imagine un coming-of-age movie tout en oxymores. Les Ă©motions et les formes s’affrontent dans un teen movie sidĂ©rant d’emportement lyrique. Appartenant Ă  une collection d’Arte sur l’adolescence, ce chef-d’Ɠuvre enfiĂ©vrĂ© ne connut qu’une diffusion tĂ©lĂ© et aucune sortie en salle ou Ă©dition vidĂ©o en raison d’une bande-son trop chĂšre, gorgĂ©e de tubes des Bee Gees. L. Avec Leslie Azoulay, Thomas Klotz Fr., 1 h 07 1994 / Pas trĂšs catholique de Tonie Marshall Moins cĂ©lĂ©brĂ© que VĂ©nus BeautĂ©, Pas trĂšs catholique est peut-ĂȘtre le film de Tonie Marshall le plus vivant. Portrait d’une femme, Maxime, sorte de Philip Marlowe au fĂ©minin, incarnĂ©e idĂ©alement par AnĂ©mone et sa gouaille lĂ©gendaire qui trouve ici un de ses tout meilleurs emplois, oscillant entre enquĂȘte et introspection, sur fond de tĂ©nĂ©breuses affaires, le deuxiĂšme long-mĂ©trage de Tonie Marshall est avant tout une salutaire cĂ©lĂ©bration de la libertĂ© sexuelle et morale. FĂ©ministe, tendance anar, Pas trĂšs catholique n’oublie jamais la mĂ©lancolie du temps qui passe. Son charme un peu brinquebalant n’en est que plus grand. Avec AnĂ©mone, Michel Roux, Roland Bertin Fr, 1h40 1994 / Petits Arrangements avec les morts de Pascale Ferran Dans le premier long-mĂ©trage de Pascale Ferran trĂŽne fragilement un chĂąteau de sable. Une construction forcĂ©ment Ă©phĂ©mĂšre et toujours Ă  reconstruire autour de laquelle tournent un frĂšre et deux sƓurs, plus un enfant, Jumbo. Polyphonique en matiĂšre de rĂ©cits, de personnages mais aussi en termes de mixage des temporalitĂ©s, Petits Arrangements... affirme un tempĂ©rament mĂ©lancolique et cĂ©rĂ©bral, celui d’une cinĂ©aste travaillĂ©e par le deuil, la famille et le cinĂ©ma de Resnais ou de Truffaut tendance La Chambre verte. Le regard fĂ©minin n’y est jamais vraiment frontal, plutĂŽt oblique et souterrain, comme tous les courants et tous les dĂ©sirs qui traversent ce film marquant qui gagna, Ă  juste titre, la CamĂ©ra d’or en 1994. T. J. Avec Charles Berling, Catherine Ferran, Didier Sandre Fr., 1 h 48 1996 / Clueless d’Amy Heckerling EmblĂšme de la dĂ©cennie en termes de teen movies, Clueless s’affirme un peu comme une réécriture logique du roman littĂ©raire Emma de Jane Austen. Avant mĂȘme de rĂ©aliser un film pour adolescentes, Amy Heckerling interroge la pression sociale et hiĂ©rarchique de sa propre hĂ©roĂŻne, Cher, interprĂ©tĂ©e par Alicia Silverstone. Sans jamais tomber dans la mĂ©chancetĂ©, le cynisme, ou l’idiotie, la rĂ©alisatrice crĂ©er un personnage, certes princesse, mais emplis de puissance et de responsabilitĂ©. Avec un regard tendre portĂ© sur l’adolescence, Clueless s’inscrit dans les classiques du genre, et de l’empowerment fĂ©minin d’une certaine maniĂšre. Avec Paul Rudd, Donald Faison, Alicia Silverstone AmĂ©ricain, 1h38 1998 / Os Muntantes de Teresa Villaverde Au fin fond d’une ville portugaise, trois jeunes adolescents en proie Ă  la misĂšre, Ă  la drogue et Ă  la prostitution, vivent dans la rue tels des survivants. SĂ©lectionnĂ© Ă  Un Certain Regard en 1998 au Festival de Cannes, le film livre un essai poĂ©tique et philosophique. GrĂące Ă  ses recherches documentĂ©es sur les jeunes enfermĂ©s dans des centres de rĂ©insertion sociale au Portugal, la cinĂ©aste image ce qu’elle appelle “mutants”, des ĂȘtres exceptionnels qui ne se rĂ©signent jamais. Dans les annĂ©es 1990, alors que de nombreux rĂ©alisateurs tels que Pedro Costa ouvrent de nouvelles perspectives, Teresa Villaverde s’impose comme l’une des nouvelles voix fĂ©minines du cinĂ©ma portugais. Avec Ana Moreira, Alexandre Pinto, Nelson Varela Portugais, 1h54 1999 / Virgin Suicides de Sofia Coppola On peut distinguer deux catĂ©gories de premiers films. Ceux qui, dans un geste de dĂ©fĂ©rence cinĂ©phile, construisent des mondes nouveaux mais restent immanquablement hantĂ©s par un hĂ©ritage. Et ceux qui, pour exister, n’ont d’autres choix que de le tuer. Virgin Suicides, premier long mĂ©trage de Sofia Coppola adaptĂ© du roman de Jeffrey Eugenides, se situe Ă  la jointure de ces deux champs. C’est un film kamikaze, qui convoque un genre dĂ©fini le teen movie pour mieux le tordre de l’intĂ©rieur. Nous voici au cƓur d’une banlieue bourgeoise amĂ©ricaine, au dĂ©but des annĂ©es 1970. DĂšs son ouverture, le film rompt avec la candeur de son dĂ©cor chic et sophistiquĂ© Ă  outrance l’équivalent d’un bain moussant et parfumĂ©. La tragĂ©die est rĂ©vĂ©lĂ©e c’est ici que les sƓurs Lisbon se sont donnĂ© la mort. La suite est un compte Ă  rebours funĂšbre, obsĂ©dĂ© par une Ă©nigme que des garçons, des annĂ©es aprĂšs le drame, tentent de rĂ©soudre. Si le mystĂšre demeure, immense, c’est que dans ce monde puritain, le mal qui asphyxie les filles est si commun qu’il en demeure invisible. Chronique adolescente, Ă©lĂ©gie aĂ©rienne, Virgin Suicides a aussi valeur de manifeste fĂ©ministe seul le sacrifice sauvera ces hĂ©roĂŻnes des griffes du patriarcat. M. D. Avec Kirsten Dunst, Josh Hartnett, James Woods, Kathleen Turner 1 h 37 1999 / La vie ne me fait pas peur de NoĂ©mie Lvovsky Réécriture pour le cinĂ©ma du magistral Petites que NoĂ©mie Lvovsky avait rĂ©alisĂ© pour Arte, La vie ne me fait pas peur est un grand film sur l’adolescence, cet Ăąge des possibles qui bute sur l’impossible. En suivant une bande de quatre jeunes filles aux destins croisĂ©s et bientĂŽt divergents, NoĂ©mie Lvovsky se remĂ©more Ă©videmment sa propre adolescence au cƓur des annĂ©es 1970 sur un mode pop et remuant. BordĂ©lique et excessif, le film dĂ©borde de partout, et c’est trĂšs bien comme ça. Parfois, les larmes et la rage se mĂ©langent au point que le film pourrait parfois changer de titre et s’appeler A l’ombre des jeunes filles en pleurs. Mais, au final, c’est l’énergie et la couleur qui triomphent. T. J. Avec Julie-Marie Parmentier, Magali Woch Fr., Sui., 1 h 51 1999 / Boys Don’t Cry de Kimberly Peirce Pour beaucoup de femmes et d’hommes trans, Boys Don’t Cry correspond Ă  la premiĂšre fois oĂč ilelles se sont vues sur un Ă©cran. Pour d’autres, le film de Kimberly Peirce a rĂ©volutionnĂ© leur regard en mettant en scĂšne le concept d’identitĂ© transgenre chez des adolescents. InterprĂ©tĂ© par Hilary Swank jeune rĂ©compensĂ©e par l’Oscar de la meilleure actrice cinq ans avant son second triomphe, en 2005, dans Million Dollar Baby, que l’on dĂ©couvre transfigurĂ©e en sublime tomboy amoureux de ChloĂ« Sevigny, ce mĂ©lo baroque imbibĂ© de culture nineties a marquĂ© la culture LGBT + sans jouir d’une aura Ă  sa hauteur dans l’histoire rĂ©cente du cinĂ©ma amĂ©ricain. E. B. Avec Hilary Swank, ChloĂ« Sevigny 1 h 58 1999 / Beau Travail de Claire Denis Depuis son premier film, Chocolat, Claire Denis est liĂ©e Ă  l’Afrique, autant continent que territoire de son imaginaire. En 2009, elle y revient, Ă  Djibouti, oĂč s’activent quelques soldats de la LĂ©gion. Ce pourrait ĂȘtre le dĂ©but d’un honorable porno gay. C’est l’ouverture d’une tragĂ©die antique d’une part, un ex-adjudant-chef Denis Lavant, hĂ©ros dĂ©chu exilĂ© Ă  Marseille, d’autre part, un chƓur d’hommes qui commente sa chute et conspire Ă  l’augmenter. Le point de vue, vivement en trans, n’est pas celui d’une femme regardant des hommes, mais celui d’un exclu, hyper-spectateur d’un Eden-CinĂ©ma oĂč rien n’apparaĂźt des trouffionneries, mais oĂč tout transpire de rituels Ă©tranges, presque abstraits, chorĂ©graphiĂ©s souvent, torturĂ©s parfois. Comme toujours chez Claire Denis, le visage de la violence est celui d’un doux ange, fatalement exterminateur. Beau Travail est Ă©crit sur le vent du dĂ©sert, comme Melville lançait son Billy Budd au fil des ocĂ©ans. BeautĂ© fragile et jeunesse Ă©phĂ©mĂšre comme jumeaux d’une mĂȘme utopie le cinĂ©ma pour toujours. Beau Travail est un beau film. G. L. Avec Denis Lavant, GrĂ©goire Colin Fr., 1 h 30 1999 / Vorace de Antonia Bird ƒuvre inclassable du fait d’un vrai mĂ©lange des genres, Vorace sort dans l’indiffĂ©rence gĂ©nĂ©rale en France, fait un flop au box-office amĂ©ricain, mais n’en reste pas moins un grand film, basĂ© sur le fait divers de la tragĂ©die du passage de Donner durant l’hiver 1847, qui gagne Ă  ĂȘtre connu. MalgrĂ© un tournage difficile Antonia Bird n’était pas le premier choix Ă  la rĂ©alisation, notamment, le film se dĂ©marque par son humour noir et sa bande originale Ă  la fois dĂ©calĂ©e et obsĂ©dante, que l’on doit Ă  Michael Nyman et Damon Albarn. Avec Guy Pearce, Robert Carlyle, Jeremy Davies AmĂ©ricain, 1h41 2000 / Scarlet Diva de Asia Argento Pour sa premiĂšre rĂ©alisation, Asia Argento raconte l’histoire d’Anna, une actrice qui tente de passer Ă  la mise en scĂšne et qui de Rome Ă  Los Angeles croise tout ce que le show-buisness compte de rock-stars perchĂ©es, de freaks en tous genres et de producteurs priapiques suivez mon regard. Asia est donc Anna, et Anna est une sorte d’Alice carollienne arpentant un nightmare hallucinĂ©, oĂč la jeune femme semble se rĂ©approprier la figure de vierge sadisĂ©e que son pĂšre Dario avait modelĂ©e pour elle. De Charybde en Sylla, de sado en maso, de gore en trash, Asia/Anna Argento ne calme sa transe que le temps d’un sublime face Ă  face avec son reflet dans une glace sur Wild is the wind de Nina Simone aussi puissante que le rasage ensanglantĂ© du Big Shave de Scorsese. Asia se fait les aisselles mĂ©ticuleusement, se prĂ©pare, se maquille, et lorsque l’image ressemble Ă  ce qu’attendent d’elle les autres, elle dĂ©fait l’ensemble d’un revers de main, Ă©crase le rouge Ă  lĂšvres, fait couler le mascara sous les larmes. Entre narcissisme et haine de soi, figuration et dĂ©figuration, autoparodie et autocombustion, le film est un feu de bengale, divin et Ă©carlate. Avec Asia Argento, Jean Shepard, Vera Gemma Italie, 1h31 2000 / Baise-moi de Virginie Despentes et Caroline Trin Thi Baise-moi c’est beaucoup de choses. C’est d’abord l’adaptation du premier livre de Virginie Despentes, par elle-mĂȘme et Caroline Trin Thi, hardeuse chevronnĂ©e. Ensuite c’est le film qui a dĂ©clenchĂ© une polĂ©mique et une censure rarement vue en France ; interdit aux -16, retirĂ© des salles deux jours aprĂšs sa sortie car classĂ© X, il ressort finalement en salle avec une nouvelle classification interdit aux -18 » spĂ©cialement créée pour le film. Entre les deux, c’est un Telma et Louise porno et gore, qui, s’il a certes mal vieilli la laideur de l’image des premiĂšres camĂ©ras numĂ©riques et la bande-son oĂč figure des groupes comme Le Peuple de l’herbe, abrite encore un esprit punk, provocateur et un dĂ©sir de jouir en se foutant des rĂšgles social et de la morale. B. D. Avec RaffaĂ«la Anderson, Karen Bach, Patrick Eudeline Fr, 1h15 2000 / Les glaneurs et la glaneuse d’AgnĂšs Varda AgnĂšs Varda, cinĂ©aste de la proximitĂ© et de la libertĂ©, glaneuse d’images du titre de ce documentaire, suit Ă  l’aide d’une petite camĂ©ra numĂ©rique des glaneurs urbains et ruraux qui ramassent les restes dont les autres ne veulent pas, par nĂ©cessitĂ© mais aussi par choix. On croise ainsi la route d’un riche viticulteur, d’un RMIste, d’un grand chef et de sans-abris. Sorte de road-movie Ă  pied, en voiture et en train, le mouvement de ce “documentaire-routard” est Ă  la fois gĂ©ographique, historique, social, juridique et esthĂ©tique. 2001 / La CiĂ©naga de Lucrecia Martel Dans l’ambiance tropicale des alentours d’une piscine, quelques adultes au bord de l’ivresse s’enlisent sous les yeux d’une enfant. Premier long-mĂ©trage de l’Argentine Lucrecia Martel, La CiĂ©naga qui signifie “marĂ©cage” en espagnol est un festival de sensations troubles, d’odeurs dĂ©liquescentes, de sons assourdis et moites, de couleurs saturĂ©es. Plus qu’un rĂ©cit autobiographique, La CiĂ©naga prend la forme d’une collection d’ambiances menaçantes qui aborde, au passage, la condition des femmes Ă  travers l’aliĂ©nation d’une mĂšre déçue par la vie mais incapable de s’échapper d’une famille toxique. Un grand premier film sans aucun doute. T. J. Avec Mercedes MorĂĄn, Graciela Borges Arg., Fr., Esp. Jap., 1 h 43 2001 / Trouble every day de Claire Denis Le cinĂ©ma punk, trans et physique de Claire Denis a cela de particulier qu’il pousse sur les zones frontaliĂšres, qu’il aime s’aventurer en terre incertaine et ne jamais se fixer lĂ  oĂč on l’attend. La rĂ©alisatrice flirte avec les limites entre l’humain le dĂ©sir sexuel et l’inhumain la perversion ; oĂč ce qui est jugĂ© comme telle par les protagonistes en faisant du corps son motif de prĂ©dilection. C’est Les Salauds, High Life, Beau Travail, J’ai pas sommeil et bien sĂ»r Trouble Every Day. Vincent Gallo et Beatrice Dalle y incarnent des personnages partageant une mĂȘme confusion sexuelle entre soif d’amour et de sang ; ils aiment la chair autant qu’ils s’en nourrissent. Cela donne un chef-d’Ɠuvre d’horreur gore, servi par la photographie sublime d’AgnĂšs Godard et la bande-son des Tindersticks, un film sensoriel, un conte de vampire moderne oĂč se mĂȘlent prĂ©dation et consentement sexuelles. Avec Tricia Vessey, BĂ©atrice Dalle, Alex Descas Fr, 1h40 2001 / A ma sƓur de Catherine Breillat Possiblement autobiographique et vraiment fantasmatique, A ma sƓur est un prĂ©cipitĂ© du cinĂ©ma de Catherine Breillat. D’une cruditĂ© souvent au scalpel, le film de Breillat radiographie d’abord, avec gĂ©nie, les pulsions d’une jeune fille, obsĂ©dĂ©e par son dĂ©pucelage mais qui se trouve bien plus laide que sa sƓur, un canon. Longtemps naturaliste, A ma sƓur bascule finalement dans la folie d’un Ă©pilogue sidĂ©rant qui met Ă  jour le dĂ©sir sexuel au fĂ©minin sur son versant le plus dĂ©rangeant. Conte cruel de la jeunesse, pas consensuel pour un sou, A ma sƓur est un film vraiment troublant. HĂ©rĂ©tique avant tout, y compris pour les fĂ©ministes les plus radicales ! Avec AnaĂŻs Reboux, Roxane Mesquida, Libero De Rienzo Fr, 1h33 2003 / Monster de Patty Jenkins Aileen vit de son activitĂ© de prostituĂ©e et sillonne, canette de biĂšre Ă  la main, les routes sans Ăąme d’une banlieue amĂ©ricaine. Elle rencontre Selby, une jeune lesbienne dont elle tombe rapidement amoureuse, ce qui la poussera Ă  changer de vie. Charlize Theron, au-delĂ  d’ĂȘtre mĂ©connaissable elle prend 15 kilos et porte des prothĂšses sur le visage pour cette interprĂ©tation est surtout magistrale dans ce premier grand rĂŽle qui constituera son acte de naissance en tant qu’actrice et dont la performance lui vaudra un Oscar. Avec Charlize Theron, Christina Ricci, Bruce Dern AmĂ©ricain, 1h51 2003 / An Angel at My Table de Jane Campion Pour son deuxiĂšme long-mĂ©trage, Jane Campion livre un des films les plus marquants des annĂ©es 90. An Angel at My Table relate l’enfance de l’écrivaine nĂ©o-zĂ©landaise Janet Frame marquĂ©e par le deuil, la dĂ©pression et l’exclusion. Au bord du gouffre et en lutte contre ses propres dĂ©mons, la romanciĂšre brave les conventions en trouvant refuge dans la poĂ©sie. Si cet exercice immersif traite de la folie, le film rend Ă©galement hommage Ă  l’anticonformisme et Ă  la solitude de l’artiste. Au travers d’une Ă©criture et d’une esthĂ©tique fĂ©minine, Jane Campion, parle du combat complexe des femmes Ă  exister dans une sociĂ©tĂ© qui les excluent. Avec Kerry Fox, Alexia Keogh, Karen Fergusson NĂ©o-zĂ©landais, 2h38 2003 / Il est plus facile pour un chameau de Valeria Bruni Tedeschi “Il est plus facile pour un chameau de passer par le chas d’une aiguille que pour un riche d’entrer au royaume des cieux”. Si le titre est tirĂ© d’un passage de la Bible, son film est lui surtout inspirĂ© de sa vie. Federica, interprĂ©tĂ©e par elle-mĂȘme, est une femme, la trentaine, fille d’immigrĂ©s italiens prise de culpabilitĂ© du fait d’ĂȘtre immensĂ©ment riche. AccablĂ©e par son hĂ©ritage, elle va se rĂ©fugier dans son imaginaire. Dans son premier long-mĂ©trage en tant que rĂ©alisatrice, Valeria Bruni Tedeschi expose non seulement sa personnalitĂ© rĂȘveuse, mais parle aussi du dĂ©sir d’affranchissement. Avec Valeria Bruni Tedeschi, Chiara Mastroianni, Jean-Hugues Anglade Fr, 1h50 2003 / Shara de Naomi Kawase On connaĂźt l’histoire un enfant disparaĂźt et sa figure absente ruine la vie d’une famille bien des annĂ©es aprĂšs. De ces mĂ©los fantomatiques on en a mangĂ© mille et cent. Alors pourquoi ce sentiment, face Ă  Shara, de n’avoir jamais vu ça ? C’est que la rĂ©alisatrice Naomi Kawase amĂšne avec elle sur ses plateaux quelques tours spĂ©cifiques. Par exemple celui-ci engager un camĂ©raman travaillant d’ordinaire dans le champ du documentaire et ne pas lui donner de script pour qu’il filme chaque scĂšne avec les tremblements du direct. Ainsi, trouver un regard inĂ©dit sur des personnages ne passe pas nĂ©cessairement comme on pourrait le croire par l’invention d’une maĂźtrise nouvelle mais aussi par des ruses imprĂ©vues pour troubler/Ă©garer les maĂźtrises anciennes. La beautĂ© du rĂ©sultat dans Shara est terrassante. Toutes les pĂ©ripĂ©ties de la fiction surgissent Ă  l’écran comme des Ă©vĂ©nements. A l’instar du grand orage d’étĂ© qui vient bouleverser d’un coup la parade finale. Avis aux chercheurs d’or qui n’a pas vu la pluie tomber chez Kawase ne sait pas ce qu’est la joie. P. B. Avec Kohei Fukungaga, Yuka Hyyoudo Jap., 1 h 40 2004 / Mystification ou l’histoire des portraits de Sandrine Rinaldi Mystification est une adaptation d’un rĂ©cit de Diderot, transposĂ© de nos jours. Pour son premier moyen-mĂ©trage il y en aura un second trois ans plus tard, Cap Nord, Sandrine Rinaldi Ă©galement critique de cinĂ©ma sous le pseudo de Camille Nevers retient de Diderot le goĂ»t des cruelles machinations, des collusions secrĂštes, de l’alliance opaque entre les rĂšgles sociales et les raffinements du libertinage, mais plus encore la langue du texte original, qu’il s’amuse Ă  chahuter. Que la machination prenne satisfait peut-ĂȘtre davantage le dĂ©sir informulĂ© de celle qu’on mystifie que ceux qui croient la manipuler. Qui dĂ©sire quoi ? Qui aime encore ? Et qui met en scĂšne ce sac de nƓuds, d’incertitudes et de regrets informulĂ©s ? VoilĂ  l’imbroglio que le film emmĂȘle avec un humour distant et une grande inspiration visuelle. Avec Camille Cayol, Laurent Lacotte Fr., 59 min 2005 / Marseille d’Angela Schanelec Sophie, une jeune photographe allemande, Ă©change son appartement avec une Ă©tudiante habitant Ă  Marseille. Elle rencontre Pierre, un mĂ©canicien, avec qui elle flirte puis, une fois rentrĂ©e Ă  Berlin, retrouve les choses comme elle les a laissĂ©es – notamment son amour pour le mari de sa meilleure amie Hanna. Avec ce film, un des reprĂ©sentants du nouveau cinĂ©ma allemand des annĂ©es 2000, aux antipodes de la théùtralitĂ© expressionniste qui a fondĂ© le cinĂ©ma allemand notamment grĂące Ă  la modernitĂ© de la mise en scĂšne et du rĂ©cit, Angela Schanelec signe une Ɠuvre tiraillĂ©e entre l’espoir et un Ă©ternel retour Ă  la case dĂ©part, avec la solitude de son personnage principal en toile de fond. Avec Maren Eggert, Emily Atef, Alexis Loret Allemand, 1h35 2005 / Innocence de Lucile Hadzihalilovic AdaptĂ© d’une nouvelle allemande de Frank Wedekind, Lucile Hadzihalilovic livre un premier film des plus singuliers du cinĂ©ma français contemporain. Dans une forĂȘt coupĂ©e du monde, l’arrivĂ©e d’une nouvelle fille dans un Ă©trange pensionnat pour fillettes va bousculer leur quotidien. L’intrigue nĂ©buleuse Ă©troitement inspirĂ©e du Suspiria de Dario Argento et de Pique-nique Ă  Hanging Rock de Peter Weir, dessine, Ă  travers mutations et Ă©veil, le passage de l’enfance Ă  l’adolescence. LĂ  oĂč rĂ©side tout l’équilibre du film est que le regard fĂ©minin derriĂšre la camĂ©ra, capte l’innocence comme la sexualitĂ©, sans jamais crĂ©er quelconque malaise, qu’un Ɠil masculin incompris aurait pu avoir. Hadzihalilovic met en scĂšne un rĂ©cit sombre et candide Ă  la fois, miroir de la complexitĂ© que d’ĂȘtre une jeune fille. Avec ZoĂ© Auclair, Lea Bridarolli, BĂ©rangĂšre Haubruge Fr, 1h55 2006 / Lady Chatterley de Pascale Ferran Constance Chatterley, jeune femme de la haute bourgeoisie anglaise, est enfermĂ©e dans son mariage avec les responsabilitĂ©s et devoirs que cela implique. Lorsqu’elle rencontre Parkin, le garde-chasse du domaine, c’est le dĂ©but d’un difficile apprivoisement, un Ă©veil Ă  la sensualitĂ© pour la lady et un long retour Ă  la vie pour l’amant. Entre orfĂšvrerie du dĂ©coupage, majestĂ© des durĂ©es et incandescence des Ă©motions, ce film fiĂ©vreux est une petite merveille de sensibilitĂ©, d’intelligence de cinĂ©ma, d’une puissance d’expression d’autant plus forte et admirable qu’elle n’a l’air de rien. Avec Marina Hands, Jean-Louis Coulloc’h, Hippolyte Girardot Fr, Belge, 2h38 2007 / Tout est pardonnĂ© de Mia Hansen-LĂžve Le ressentiment, son dĂ©passement, ou mĂȘme l’absence totale de sa formation sont forcĂ©ment au cƓur d’un film intitulĂ© Tout est pardonnĂ©. Mais que couvre ce “tout”, qui est pardonnĂ©, dans le premier long-mĂ©trage de la jeune Mia Hansen-LĂžve ? Dans la premiĂšre partie, une famille est dĂ©sagrĂ©gĂ©e par la toxicomanie d’un pĂšre dĂ©faillant. Dans la deuxiĂšme, la petite fille du dĂ©but retrouve Ă  17 ans ce pĂšre et ne ressent contre lui aucune animositĂ©. D’oĂč vient pareille sĂ©rĂ©nitĂ© ? C’est tout le mystĂšre du film. Etrangement ici, le malheur accumulĂ© dans la premiĂšre partie flotte et ne pĂšse pas sur la seconde. Entre les deux temps du film, les liens de causalitĂ© sont lĂąches, estompĂ©s, prennent des chemins vicinaux, presque invisibles. A 26 ans, Mia Hansen-LĂžve trouvait du premier coup, et dans toute sa plĂ©nitude, la formule magique de son cinĂ©ma, mixte de luciditĂ© et de douceur, de proximitĂ© sensible et de dĂ©tachement clairvoyant. L. Avec Paul Blain, Constance Rousseau Fr., 1 h 45 2007 / Persepolis de Marjane Satrapi EncensĂ©e par la presse mondiale, l’Ɠuvre autobiographique publiĂ©e dans les annĂ©es 2000 a fait de Satrapi l’une des autrices francophones les plus reconnues. Suite Ă  son adaptation Ă©ponyme sur grand Ă©cran, Marjane Satrapi, dont le style graphique et narratif personnel avait dĂ©jĂ  su retenir l’attention, obtient le Prix du Jury du Festival de Cannes. PersĂ©polis raconte l’histoire rĂ©cente de l’Iran Ă  travers les yeux de Marjane, en passant de son enfance Ă  TĂ©hĂ©ran durant la rĂ©volution islamique Ă  son intĂ©gration dans la vie europĂ©enne. A base de rĂ©gime dictatorial et de rĂ©pression, Satrapi arrive Ă  signer une Ɠuvre singuliĂšre, universelle et humaniste. Avec les voix de Sean Penn, Iggy Pop, Gena Rowlands Fr, 1h35 2008 / Twilight – Chapitre 1, fascination de Catherine Hardwicke L’exploit de Twilight, la saga de best-sellers de Stephenie Meyer, tenait Ă  sa fĂ©minisation des codes de la littĂ©rature horrifique pour ados. L’adaptation que signe Catherine Hardwicke rĂ©alisatrice d’un film indĂ© remarquĂ©, Thirteen, dĂ©jĂ  sur l’adolescence Ă©claire au passage de ses rayons inversĂ©s un secret ultime du genre que nous rĂ©vĂšle du dĂ©sir fĂ©minin cette attirance orgueilleuse et obstinĂ©e pour une crĂ©ature qui ne rĂȘve que d’une chose, tuer la femme qui l’aime ? Le film devient dĂšs lors le rĂ©cit dialectique de la rencontre plus que du conflit entre deux dĂ©sirs, celui d’une jeune fille qui exige de l’homme qu’elle aime qu’il la tue, et celui d’un vampire contraint, par amour, à
 devenir vĂ©gĂ©tarien. Mais Ă  dĂ©sirer un lion pacifique, ou un vampire vĂ©gĂ©tarien, la jeune hĂ©roĂŻne de Twilight risque une fin plus hitchcockienne Soupçons que breillatienne Une vraie jeune fille l’abstinence. H. F. Avec Kristen Stewart, Robert Pattinson 2 h 02* 2009 / Bliss de Drew Barrymore Lorsqu’une actrice qu’on suit depuis longtemps fait son premier film, on se demande toujours s’il ressemblera Ă  ce qu’on connaĂźt d’elle. Soit la petite fille d’E. T. Spielberg, la productrice audacieuse de Donnie Darko Richard Kelly, l’actrice qui essaie d’adapter son physique de rondouillarde aux canons hollywoodiens. Ici, Drew Barrymore choisit une forme de repli joyeux en tablant sur un mixte d’intrigue adolescente classique et d’esprit rebelle un peu carrĂ© une jeune fille veut Ă©chapper Ă  un destin conventionnel, auquel elle offre une dimension foutraque inattendue la passion pour le sport. Si le cinĂ©ma amĂ©ricain a su trouver des exutoires physiques aux adolescents le skate, la danse, le surf, il n’y avait pas grand-chose jusqu’ici pour leurs alter ego fĂ©minins. Drew Barrymore leur offre le roller derby, compĂ©titions de roller sur piste oĂč il s’agit de gagner des points en dĂ©passant ses adversaires, voire en les Ă©jectant. Vitesse, agressivitĂ©, jolies tenues paillettes et shorts, musique Ă  fond, public surexcitĂ©, coups et blessures assurĂ©s une forme de gloire tapageuse est lĂ , composant la meilleure partie du film. Avec Ellen Page et Drew Barrymore AmĂ©ricain, 2h 2010 / Winter’s Bone de Debra Granik Ce second film de Debra Granik se dĂ©marque par sa sĂ©cheresse, sa tĂ©nuitĂ© psychologique et son refus de cĂ©der aux sirĂšnes misĂ©rabilistes. Il s’accroche dĂšs les premiers plans aux boots de son hĂ©roĂŻne, la taciturne et obstinĂ©e Ree exceptionnelle Jennifer Lawrence, rĂ©vĂ©lĂ©e par ce rĂŽle, qu’il ne lĂąchera plus jusqu’à la fin. Vendu comme un film social Ă  l’europĂ©enne on pense certes Ă  Ken Loach, Winter’s Bone a tous les traits du western, genre essentiellement amĂ©ricain, abstrait, mythologique. A l’instar de Kelly Reichardt, Debra Granik utilise la crise morale, Ă©conomique comme pur moteur fictionnel, davantage soucieuse d’en montrer les effets concrets que d’en dĂ©noncer les causes. Point de rĂ©el mĂ©chant ici mais une attention constante Ă  l’inextinguible flux vital des hommes et des femmes lorsqu’un vieux cow-boy rouillĂ© se saisit d’un banjo, par exemple, qu’un soldat explique longuement, presque en chuchotant, Ă  Ree pourquoi ce n’est pas une bonne idĂ©e pour elle de s’engager dans l’armĂ©e, ou qu’un enfant se met Ă  faire du trampoline, en apesanteur. Avec Jennifer Lawrence, John Hawkes, Kevin Breznahan AmĂ©ricain, 1h40 2010 / La DerniĂšre Piste de Kelly Reichardt La DerniĂšre Piste ne renvoie pas Ă  une fin mais bien Ă  un dĂ©but, c’est un rĂ©cit des origines que réécrit Kelly Reichardt. Dans quatriĂšme film, elle offre Ă  la conquĂȘte de l’ouest une nouvelle mythologie, du point de vue des femmes notamment Ă  travers les yeux du personnage incarnĂ© par une extraordinaire Michelle Williams, actrice fĂ©tiche de Kelly Reichardt et des natifs, plutĂŽt que de celui du mĂąle blanc. C’est sans-doute son film le plus sĂ©duisant plastiquement, on y retrouve cette façon de traiter le paysage comme un territoire abstrait et immense, dont l’écrasante horizontalitĂ© Ă©crase la petite verticalitĂ© humaine. Dans ce film de silence, de poussiĂšre et de ciel voilĂ©, l’essentiel est dans les dĂ©tails, comme toujours dans l’Ɠuvre de la cinĂ©aste amĂ©ricaine, qui fait plus que jamais preuve dans ce film d’un art contemplatif, brute et minimaliste tout droit hĂ©ritĂ© de Robert Bresson. Avec Michelle Williams, Paul Dano, Bruce Greenwood AmĂ©ricain, 1h44 2011 / Tomboy de CĂ©line Sciamma Dans les premiĂšres scĂšnes de Tomboy, le spectateur voit un petit garçon lĂ  oĂč tous les autres personnages ses parents, sa petite sƓur voient une petite fille. Dans la suite du rĂ©cit, il voit une petite fille lĂ  oĂč tous les autres croient jouer et chahuter avec un petit garçon. Tendu, intrigant, Tomboy utilise toutes les recettes du film Ă  suspense. Mais CĂ©line Sciamma est particuliĂšrement habile pour manier une dramaturgie trĂšs construite, tout en masquant la charpente. Les situations sont intenses, mais c’est la description en profondeur des personnages, l’étude de caractĂšre, qui a le dernier mot. Comme si la cinĂ©aste transposait une certaine efficacitĂ© de storytelling amĂ©ricaine dans le vocabulaire du cinĂ©ma d’auteur français, puisait dans la boĂźte Ă  outils d’Aaron Sorkin A la Maison Blanche, The Social Network pour raconter un film de Jacques Doillon. Le film dĂ©crit avec une acuitĂ© rare l’éboulement du monde dans les yeux de ceux qui n’ont vu que ce qu’ils voulaient voir, n’ont pas vu ce qu’il fallait voir. Cette perturbation, CĂ©line Sciamma la filme avec une touche lĂ©gĂšre, estompant la gravitĂ© par l’humour, sans esquiver la violence de certaines situations. Et elle joint sans forcer la puissance Ă  la finesse. Avec ZoĂ© HĂ©ran, Malonn LĂ©vana, Jeanne Disson Fr, 1h22 2011 / La guerre est dĂ©clarĂ©e de ValĂ©rie Donzelli “Si tu veux ĂȘtre actrice, Ă©cris tes propres films.” C’est encouragĂ© par JĂ©rĂ©mie ElkaĂŻm, compagnon et collaborateur, que ValĂ©rie Donzelli se lance dans la rĂ©alisation. La cinĂ©aste et comĂ©dienne devient la reine de ses propres fictions derriĂšre et devant la camĂ©ra. Ses rĂ©cits racontent, avec une trivialitĂ© joueuse qui donne Ă  son Ɠuvre cette vibration si singuliĂšre, la maternitĂ© et le couple. En 2010, ce cinĂ©ma autobiographique et irrĂ©sistiblement foutraque rencontre un succĂšs retentissant avec La guerre est dĂ©clarĂ©e, vĂ©ritable histoire de son enfant malade. Le film, lĂ©ger et enragĂ©, est une dĂ©flagration Ă©motionnelle. Donzelli affine son style et affirme son geste de cinĂ©aste faire du cinĂ©ma pour mieux vivre. M. D. Avec ValĂ©rie Donzelli, JĂ©rĂ©mie ElkaĂŻm Fr., 1 h 40 2012 / Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow Au moment oĂč Kathryn Bigelow rĂ©alise Zero Dark Thirty, elle vient de marquer l’histoire en devenant la premiĂšre femme et toujours la seule Ă  ce jour Ă  dĂ©crocher l’Oscar de la meilleure rĂ©alisation pour DĂ©mineurs 2010, devant son ex-mari James Cameron et Quentin Tarantino. Son statut au sommet du cinĂ©ma hollywoodien, oĂč elle mĂȘle action et film de guerre, se confirme avec le film suivant, Zero Dark Thirty, prĂ©cis et haletant sur la traque d’Oussama Ben Laden. Du splendide raid final presque entiĂšrement dans le noir Ă  l’incroyable assurance du personnage d’analyste de la CIA le meilleur rĂŽle de Jessica Chastain, en passant par la description inspirĂ©e du milieu militaire et des hommes entre eux, le talent de Bigelow explose Ă  chaque plan. Aujourd’hui ĂągĂ©e de 68 ans, la rĂ©alisatrice du culte Point Break 1991 a perdu de son aura Ă  la suite de l’échec commercial du trĂšs controversĂ© Detroit 2017, consacrĂ© Ă  des Ă©meutes raciales. Mais il serait temps de replonger dans une filmographie qui compte dix longs-mĂ©trages capables de revisiter le mythe du vampire Aux frontiĂšres de l’aube, 1987, de sonder les images contemporaines violentes Strange Days, 1995 ou de retourner sur ses bases le thriller policier Blue Steel, 1990
Le parcours de Bigelow est plus transversal et surprenant qu’un regard de surface pourrait le laisser croire. Sa premiĂšre ambition Ă©tait de devenir peintre. Elle a commencĂ© Ă  rĂ©aliser des films commerciaux aprĂšs une longue pĂ©riode dans l’art contemporain des annĂ©es 1970, travaillant avec Richard Serra et Lawrence Weiner, figure de l’art conceptuel, ainsi que l’intellectuel français SylvĂšre Lotringer, fondateur de la revue Semiotexte et futur “hĂ©ros” du manifeste fĂ©ministe I Love Dick de Chris Kraus. InspirĂ©e par la cinĂ©philie moderne elle a Ă©voquĂ© sa passion pour “la matrice Fassbinder/Douglas Sirk”, Kathryn Bigelow a finalement atterri Ă  Hollywood par accident. Alors qu’elle avait Ă©tĂ© envisagĂ©e pour rĂ©aliser Wonder Woman, aucun futur projet n’est aujourd’hui annoncĂ©. O. J. Avec Jessica Chastain, Joel Edgerton, Chris Pratt 2 h 37 2012 / Cloud Atlas de Lana et Lily Wachowski De l’AmĂ©rique esclavagiste du XXe siĂšcle au SĂ©oul du futur, Ă  travers une demi-douzaine de rĂ©cits prĂ©levĂ©s Ă  des Ă©poques diverses, les sƓurs Wachowski au moment du tournage, Lily Ă©tait nĂ©anmoins encore Andy brassent une odyssĂ©e Ă©bouriffante de l’émancipation. Les mĂȘmes acteurs interprĂštent une variĂ©tĂ© de personnages, tous Ăąges, espĂšces, genres confondus, dans une enivrante valse transformiste. On retrouve lĂ  l’obsession des Wachowski pour un cinĂ©ma mouvant, en phase avec son Ă©poque, dont il vampirise les innovations, qui les a menĂ©es de l’ùre du tout-numĂ©rique Matrix et Speed Racer Ă  celle des sĂ©ries et de leur Ă©criture prolifĂ©rante. Un grand film mutant. R. B. Avec Tom Hanks, Halle Berry, Ben Whishaw 3 h 12 2012 / L’ñge atomique d’HĂ©lena Klotz L’Âge atomique est le premier long-mĂ©trage, fragile et trĂšs beau, d’une jeune femme de 32 ans, HĂ©lĂ©na Klotz. Son sujet est l’adolescence, ses pulsions de sexe et de mort confondues, ses enthousiasmes et ses prostrations, sa grandeur et son ridicule. Son dĂ©cor est Paris la nuit, ses gares, ses trains de banlieue, ses clubs souterrains, ses ponts et ses forĂȘts voisines. Le film lui-mĂȘme semble attirĂ© par une force obscure tandis qu’il s’écarte de tout rĂ©alisme pour emprunter les sentiers d’un romantisme noir, Ă©voquant Jean-Paul Civeyrac, et d’un fantastique primitif, hyperstylisĂ©. C’est la grande force de ce jeune cinĂ©ma sans gĂȘne et aventureux, qui n’hĂ©site pas Ă  frayer dans les eaux du bis ou Ă  croiser les imaginaires pour inventer sa propre langue. Avec Elliott Paquet, Dominik Wojcik, Niels Schneider Fr, 1h08 2013 / Elle s’en va d’Emmanuelle Bercot Peut-on ĂȘtre un ĂȘtre de fuite et un ĂȘtre de courage ? Pour tenir ce paradoxe, le rendre possible avec Ă©vidence, il suffit Ă  Emmanuelle Bercot de filmer Catherine Deneuve, qui comme nulle autre conjugue toujours la prĂ©sence d’une forme d’absence, la retenue d’une forme d’audace. En suivant une femme qui choisit sur un coup de tĂȘte de tout plaquer, Bercot rĂ©ussit un road-movie Ă©mancipateur Ă  l’humeur changeante, drĂŽle et poignant, convoyĂ© avec une inspiration folle par son interprĂšte. Avec Catherine Deneuve Fr, 1h53 2013 / Tirez la langue, mademoiselle d’Axelle Ropert D’abord fine critique dans La Lettre du cinĂ©ma, foyer cinĂ©phile au tournant du siĂšcle, puis scĂ©nariste, Axelle Ropert a transposĂ© son goĂ»t pour le classicisme hollywoodien et une certaine Ă©cole française non spectaculaire dans ses propres films. Tirez la langue mademoiselle est une belle histoire d’amour chuchotĂ©e dans les dĂ©cors du 13e arrondissement, ainsi que le portrait d’une mĂšre cĂ©libataire jouĂ©e par Louise Bourgoin. Ropert tourne actuellement son cinquiĂšme long-mĂ©trage Petite Solange avec Philippe Katherine et LĂ©a Drucker. Avec Louise Bourgoin, CĂ©dric Kahn, Laurent Stocker Fr, 1h42 2015 / Mustang de Deniz Gamze Erguven Ce premier long-mĂ©trage en forme de cavalcade polissonne et fĂ©minine, joyeuse et enragĂ©e, nous immerge dans le monde damnĂ© des jeunes sƓurs mariĂ©es de force. L’incontestable rĂ©ussite de Mustang tient au filmage du corps collectif sororal superbement fluide et chatoyant, bouquet de “jeunes filles en fleurs” telles qu’on les trouve de Proust Ă  Sofia Coppola. Il existe chez Deniz Gamze ErgĂŒven un vitalisme, une scĂ©nographie vitaminĂ©e qui, Ă  chaque instant, Ă©meut et Ă©gaie l’Ɠil, nous attrape. Trait qui range le film du cĂŽtĂ© d’un “fĂ©minisme joyeux”, expression utilisĂ©e par AgnĂšs Varda pour qualifier la couleur de ses propres films. Sans diaboliser le mariage arrangĂ© l’une des sƓurs y trouve son compte de cĂąlins et de baisers, la rĂ©alisatrice dĂ©nonce une tradition nuisible dĂšs lors qu’elle se meut en tyrannie, en prison. Avec GĂŒneß Nezihe ƞensoy, Doğa Zeynep Doğußlu, Elit İßcan Turc, 1h33 2016 / Grave de Julia Ducournau Premier long-mĂ©trage de Julia Ducournau repĂ©rĂ©e Ă  Cannes pour son court-mĂ©trage Junior, Grave raconte le parcours semĂ© d’embĂ»ches de Justine, Ă©tudiante en premiĂšre annĂ©e d’une Ă©cole vĂ©tĂ©rinaire. Justine se dĂ©couvre une appĂ©tence pour le sang, et bientĂŽt pour la chair humaine. GonflĂ©, poĂ©tique, fĂ©roce, ce film girly et anthropophage incarne la prise de pouvoir d’une nouvelle gĂ©nĂ©ration fracassante de rĂ©alisatrices. E. B. Avec Garance Marillier, Ella Rumpf, Rabah NaĂŻt Oufella Fr., Bel., 1 h 38 2016 / Toni Erdmann de Maren Ade L’histoire d’une businesswoman allemande Ă©migrĂ©e Ă  Bucarest, oĂč elle travaille pour une sociĂ©tĂ© pĂ©troliĂšre, et de son pĂšre, amateur de farces et attrapes et de canulars lourdingues, engagĂ© dans une reconquĂȘte kamikaze du cƓur de sa fille. L’esprit Ă  la fois rigide et dĂ©lurĂ©, la parfaite nettetĂ© de l’écriture, l’étrange appĂ©tit pour le ridicule de Toni Erdmann transcendent sa sĂ©cheresse formelle apparente. Le troisiĂšme long-mĂ©trage de Maren Ade Ă©galement productrice des longs-mĂ©trages de son compagnon Ulrich Köhler et des films de Miguel Gomes est certes drĂŽle – il l’est vraiment –, mais il est beaucoup moins une comĂ©die qu’un film sur le rire, sur sa psychologie, sur sa fonction sociale, sur son pouvoir de dĂ©rĂšglement. T. R. Avec Sandra HĂŒller, Peter Simonischek, Michael Wittenborn All., Aut., Mona., Rou., Fr., Sui., 2 h 42 2016 / Certaines femmes de Kelly Reichardt S’il est problĂ©matique de parler d’un cinĂ©ma fĂ©minin, essentialisĂ© par le genre de son autrice, il semble Ă©vident que filmer implique plus souvent pour une femme que pour un homme une forme de dĂ©cadrage, de mise en scĂšne d’un espace jusque-lĂ  peu visible, une façon de faire sien un mĂ©dium majoritairement masculin. La filmographie de Kelly Reichardt est Ă  ce titre Ă©loquente. D’Old Joy 2006 Ă  La DerniĂšre Piste 2010 en passant prochainement par First Cow 2019, la rĂ©alisatrice amĂ©ricaine n’aura eu de cesse de dĂ©velopper sa propre mythologie de l’Ouest lointain, trĂšs loin des clichĂ©s du western. Certaines femmes, adaptation de trois nouvelles de l’écrivaine amĂ©ricaine Maile Meloy, brosse le quotidien de quatre femmes vivant dans une petite ville du Montana, interprĂ©tĂ©es par un formidable quatuor d’actrices Kristen Stewart, Laura Dern, Michelle Williams et la rĂ©vĂ©lation Lily Gladstone. L’art Ă©purĂ© de Kelly Reichardt, Ă  la fois rustique et raffinĂ©, aussi taiseux par le verbe que prolixe par la forme, y atteint des sommets de prĂ©cision de trait. Dans ce film livrĂ© aux quatre vents des paysages dĂ©sertiques du nord-ouest des Etats-Unis, elle explore la condition fĂ©minine en prise avec la misogynie ordinaire de l’AmĂ©rique profonde. B. D. Avec Michelle Williams, Kristen Stewart, Laura Dern 1 h 47 2016 / American Honey d’Andrea Arnold MĂ©langeant comĂ©diens pros Shia LaBeouf, Riley Keough et amateurs, l’errance d’une jeunesse bigarrĂ©e dans l’AmĂ©rique profonde, au son de la trap et sous les vapeurs de fumette
 FilmĂ© au plus prĂšs des peaux, de la nature et de l’asphalte, entre parkings de supermarchĂ©s et grands espaces brĂ»lants, American Honey donne l’occasion Ă  Andrea Arnold Red Road, Fish Tank de dĂ©velopper son sens aigu d’un cinĂ©ma musical et sensuel, capable de traquer la violence du monde celle de l’argent roi et de la domination masculine pour conquĂ©rir un espace de beautĂ©. Un rĂȘve panthĂ©iste et fĂ©minin dont l’hĂ©roĂŻne se libĂšre sous nos yeux. O. J. Avec Sasha Lane, Shia LaBeouf 2 h 43 2017 / The Rider de ChloĂ© Zhao Rares sont les films retournant le gant de la virilitĂ© avec autant de dĂ©licatesse que The Rider, second film de la rĂ©alisatrice amĂ©ricaine d’origine chinoise ChloĂ© Zhao. Elle y suit la guĂ©rison d’un cow-boy moderne, star locale de rodĂ©o victime d’un grave accident cĂ©rĂ©bral. Dans une mise en scĂšne proche du documentaire, ChloĂ© Zhao cultive dans ce film un care gaze qui porte autant sur une dĂ©construction de la masculinitĂ© que sur le rapport Ă  l’animal ou sur le sort des populations indiennes. On attend avec impatience The Eternals, son troisiĂšme film prĂ©vu pour cet automne, puisque ce blockbuster bardĂ© de stars Angelina Jolie, Salma Hayek, Kit Harington s’annonce aussi comme le premier film de super-hĂ©ros Marvel avec un personnage transgenre. B. D. Avec Brady Jandreau, Mooney, Tim Jandreau 1 h 44 2017 / Lady Bird de Greta Gerwig Si l’on dĂ©couvre Greta Gerwig lorsqu’elle devient l’égĂ©rie du cinĂ©ma indĂ© amĂ©ricain avec Frances Ha 2012 de Noah Baumbach, l’AmĂ©ricaine a un dĂ©sir de cinĂ©ma qui excĂšde celui d’ĂȘtre actrice. Et ce dĂšs ses dĂ©buts, puisqu’elle cosigne ses premiers films en plus d’y jouer Hannah Takes the Stairs, Nights and Weekends. Elle rĂ©alise avec Lady Bird son premier film en solo. Autobiographique, il Ă©pouse l’envol d’une jeune femme Ă©prise de théùtre qui projette de quitter son lycĂ©e de Sacramento pour New York et son bouillonnement culturel. Il explore ce moment charniĂšre oĂč se jouent Ă  la fois les premiĂšres amours, l’arrachement familial et se dessine une forme d’ambition existentielle. La rĂ©alisatrice y trouve un alter ego en la personne de Saoirse Ronan. Elle forme avec TimothĂ©e Chalamet un couple Ă©tincelant dans le film suivant de la cinĂ©aste Les Filles du docteur March. B. D. Avec Saoirse Ronan, Laurie Metcalf, TimothĂ©e Chalamet 1 h 34 2017 / Les Bums de plage d’Eliza Hittman Avant de rĂ©aliser des Ă©pisodes de la saison 2 de 13 Reasons Why, la jeune rĂ©alisatrice new-yorkaise obtenait un vif succĂšs d’estime avec son second long-mĂ©trage, Les Bums de plage. Disponible aujourd’hui sur Netflix, le film raconte l’incapacitĂ© de jouissance d’un jeune garçon qui sent une pulsion homosexuelle sans pouvoir pleinement l’embrasser. Entre Moonlight et Beau Travail et portĂ© par le trĂšs beau 16 mm de la chef-opĂ©ratrice française HĂ©lĂšne Louvart, le film est aussi heurtĂ© que pointilleux dans cette auscultation d’un empĂȘchement du dĂ©sir. B. D. Avec Harris Dickinson, Madeline Weinstein, Kate Hodge 1 h 38 2017 / Wonder Woman de Patty Jenkins Si ses bracelets d’acier et son body Ă©toilĂ© hantent tout autant l’imaginaire collectif des fans de comic books que la cape de Batman, il aura fallu des annĂ©es avant que Wonder Woman, icĂŽne fĂ©ministe, apparaisse sur grand Ă©cran. Le film marque la premiĂšre incursion d’une femme Ă  la rĂ©alisation du genre dominant la planĂšte dans les annĂ©es 2010 le blockbuster super-hĂ©roĂŻque. Aux antipodes des torsions tĂ©nĂ©breuses d’un Christopher Nolan, Patty Jenkins rĂ©vĂ©lĂ©e avec Monster en 2003 tire son odyssĂ©e guerriĂšre vers un cinĂ©ma pop et lĂ©ger. On n’oubliera pas ces premiĂšres scĂšnes troublantes sur l’harmonie d’une Ăźle-gynĂ©cĂ©e avant que l’hĂ©roĂŻne ne vienne se heurter Ă  notre monde. M. D. Avec Gal Gadot, Chris Pine, Robin Wright Ch., H. K., 2 h 21 2018 / Heureux comme Lazarro d’Alice Rohrwacher Fable d’abord pastorale puis urbaine, le troisiĂšme film de la jeune rĂ©alisatrice italienne Alice Rohrwacher, prix du scĂ©nario Ă  Cannes en 2018, ex aequo avec Trois Visages de Jafar Panahi, suit la figure d’un garçon candide, d’un ravi de la crĂšche qui ne trouve son bonheur qu’en observant la nature et en se mettant au service de ses semblables. Il vit d’abord dans une communautĂ© de paysans mise Ă  l’écart du monde par des bourgeois dans le but de les exploiter, avant d’ĂȘtre libĂ©rĂ© et plongĂ© dans le monde contemporain, synonyme pour lui de la plus grande pauvretĂ©. Ce film sur l’innocence corrompue, doublĂ© d’un conte poĂ©tique et politique sur le capitalisme, ressuscite le cinĂ©ma de Pier Paolo Pasolini La Ricotta par exemple et fait d’Alice Rohrwacher l’une des rĂ©alisatrices les plus talentueuses et singuliĂšres d’Europe. Avec Adriano Tardiolo, Alba Rohrwacher, Agnese Graziani Italie, 2h07 2019 / Atlantique de Mati Diop AprĂšs Mille Soleils, le moyen-mĂ©trage documentaire que Mati Diop a consacrĂ© en 2013 Ă  son oncle, figure disparue d’un cinĂ©ma sĂ©nĂ©galais hantĂ© par son passĂ©, la rĂ©alisatrice raconte une nouvelle histoire de fantĂŽme avec Atlantique, son premier long-mĂ©trage rĂ©compensĂ© du grand prix du jury Ă  Cannes l’an dernier. Film Ă  la lisiĂšre du fantastique, Ɠuvre de chair dĂ©sirante et d’esprit vengeur, Atlantique est aussi un film politique puissant qui embrasse la tragĂ©die de l’immigration clandestine et des inĂ©galitĂ©s sociales Ă  Dakar. B. D. Avec Mame Binta SanĂ©, Amadou Mbow, Ibrahima TraorĂ© Fr., SĂ©n., Bel., 1 h 44 2019 / Sibyl de Justine Triet AprĂšs un combat de rue intime et collectif La Bataille de SolfĂ©rino, Justine Triet logeait les tumultes sentimentaux et existentiels dans un seul corps en Ă©ruption celui de Virginie Efira, avocate au bord de la crise dans Victoria. En 2019, un autre prĂ©nom suffisait Ă  contenir le programme dense et rĂ©flexif vivre sa vie comme une fiction d’un film qui donnait au portrait de son hĂ©roĂŻne des allures d’odyssĂ©e. Avec une virtuositĂ© folle mĂ©lange de genres, ruptures de ton, Sibyl sondait l’ñme d’une hĂ©roĂŻne fragile et robuste en mĂȘme temps qu’il scellait la symbiose quasi parfaite entre une cinĂ©aste et une actrice. M. D. Avec Virginie Efira, AdĂšle Exarchopoulos Fr., Bel., 1 h 40 2019 / Une fille facile de Rebecca Zlotowski Pour son quatriĂšme long-mĂ©trage, Rebecca Zlotowski campe une coming-of-age story balnĂ©aire et offre Ă  Zahia le rĂŽle d’une jeune femme initiatrice d’une cousine plus jeune. Libre ou prisonniĂšre c’est toute la dialectique sur laquelle repose le film. Tandis que la cousine aĂźnĂ©e s’adonne Ă  ses habitudes de coucheuse entretenue, la cadette contemple dans un coin, hĂ©sitant Ă  embrasser cette vie de luxe et d’apparences, prenant la mesure des privilĂšges qu’elle offre en mĂȘme temps que de ce qu’il en coĂ»te d’y entrer. Et cette dialectique, le film ne la rĂ©sout pas. Il Ă©pouse un gaze insituable, il mĂšne Ă  son point de fusion la chronique d’une femme-objet, la rend Ă  la fois complĂštement chose, complĂštement dĂ©esse et complĂštement sujet – en coupant pourtant tout accĂšs Ă  son intĂ©rioritĂ©, tant pour les autres personnages que pour nous, spectateurs. C’est tout Ă  la fois le drame existentiel elle sera toujours seule et l’armure immarcescible de cette fille facile et cependant compliquĂ©e qui, contre toutes les estocades masculines, et feignant de leur cĂ©der l’entrĂ©e, demeure impĂ©nĂ©trable. T. R. Avec Zahia Dehar, Mina Farid Fr., 1 h 31 2019 / Portrait de la jeune fille en feu de CĂ©line Sciamma “Prenez le temps de me regarder.” Le premier dialogue du Portrait de la jeune fille en feu va encore rĂ©sonner longtemps, dans toute sa douceur et sa rage, mais aussi sa pertinence politique. A la fois une caresse et un cri. Autour d’une histoire d’amour lesbienne au XVIIIe siĂšcle une peintre dresse le portrait d’une aristocrate promise au mariage, CĂ©line Sciamma a fait un film manifeste pour la mise en scĂšne de l’expĂ©rience fĂ©minine. Au cƓur des images se joue la recherche pas Ă  pas d’une Ă©galitĂ© entre artiste et modĂšle, la croyance dans l’acte de crĂ©ation comme croisement entre des corps palpitant, pont entre les organes et les dĂ©sirs, destruction des normes de pouvoir qui empĂȘchent de jouir. AprĂšs Naissance des pieuvres, Tomboy et Bande de filles, Sciamma signe le film d’une Ă©poque, au souffle profondĂ©ment libĂ©rateur. O. J. Avec AdĂšle Haenel, NoĂ©mie Marlent Fr., 2 h 02 Àtitre de comparaison, la voiture Ă©lectrique la moins chĂšre du marchĂ© – surnommĂ©e « la voiture du Peuple » – est la Hongguang Mini EV, fabriquĂ©e par Wuling (coentreprise de SAIC et General Motors) et vendue 28 800 yuans (3750 euros), tandis que la Tesla Model S est affichĂ©e au prix de 859 990 yuans (112 150 euros).

TrĂšs proche de Jean-Paul Belmondo, Alain Delon a Ă©tĂ© prĂ©venu du dĂ©cĂšs de l'acteur, avant l'annonce les deux, les relations n'ont pas toujours Ă©tĂ© au beau fixe. Mais depuis longtemps, Alain Delon et Jean-Paul Belmondo Ă©taient devenus amis, mettant de cĂŽtĂ© leurs querelles d'antan. Il faut dire que ces deux grands comĂ©diens avaient partagĂ© l'affiche Ă  de nombreuses reprises notamment dans Sois belle et tais toi, en 1958 ou encore Paris brĂ»le-t-il en 1966. Alors depuis le dĂ©cĂšs de Bebel, il manque un ĂȘtre cher Ă  Delon. "C'est un ami que je perds, un confrĂšre. Cela faisait 60 ans que l'on se connaissait, que l'on travaillait ensemble. Je suis bouleversĂ©. Il a Ă©tĂ© extraordinaire dans tout, avec une force comique exceptionnelle et un physique irremplaçable. Ça fait un mal fou, mais son image restera dans nos cƓurs, c'est le principal", confiait-il sur Europe 1. Un tĂ©moignage qui fait Ă©cho Ă  celui de Cyril Viguier, co-producteur du documentaire Belmondo par Belmondo. En effet, l'artiste s'est confiĂ© dans les colonnes de Paris Match et a rĂ©vĂ©lĂ© qu'Alain Delon avait prĂ©venu bien Ă  l'avance du dĂ©cĂšs de Jean-Paul Belmondo "Il a cherchĂ© Ă  le joindre pour prendre de ses nouvelles. Et puis, le 6 septembre, Paul Belmondo m'a envoyĂ© un message. Il voulait prĂ©venir Alain avant l'annonce", explique-t-il. L'homme explique Ă©galement qu'Alain Delon avait compris qu'il ne reverrait plus son ami, lors de leur dernier rendez-vous "Mais quelques minutes aprĂšs le dĂ©part, dans le parking, Delon m'a dit 'Je suis heureux d'ĂȘtre venu'. Il se doutait qu'il avait vu son copain pour la derniĂšre fois. Les semaines suivantes, il a cherchĂ© Ă  le joindre pour prendre de ses nouvelles".Alain Delon prĂ©sent lors de l'hommage nationalCe jeudi 9 septembre, Alain Delon sera prĂ©sent lors de l'hommage national rendu Ă  Jean-Paul Belmondo, aux Invalides Ă  Paris. Il sera accompagnĂ© de nombreuses cĂ©lĂ©britĂ©s comme, Guillaume Canet, Philippe Lellouche, Albert Dupontel... 1 000 anonymes pourront Ă©galement assister Ă  la cĂ©rĂ©monie. Le prĂ©sident de la RĂ©publique sera quant Ă  lui prĂ©sent Ă  16h30 pour dire un dernier au revoir Ă  Jean-Paul Belmondo.© DIDIER SABARDIN 2/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo Mais depuis longtemps, Alain Delon et Jean-Paul Belmondo Ă©taient devenus amis, mettant de cĂŽtĂ© leurs querelles d'antan © DIDIER SABARDIN 3/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo Alors depuis le dĂ©cĂšs de Bebel, il manque un ĂȘtre cher Ă  Delon © DIDIER SABARDIN 4/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo "C'est un ami que je perds, un confrĂšre. Je suis bouleversĂ©. Il a Ă©tĂ© extraordinaire dans tout" © DIDIER SABARDIN 5/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo Un tĂ©moignage qui fait Ă©cho Ă  celui de Cyril Viguier, co-producteur du documentaire Belmondo par Belmondo © DIDIER SABARDIN 6/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo En effet, l'artiste s'est confiĂ© dans les colonnes de Paris Match et a rĂ©vĂ©lĂ© qu'Alain Delon avait prĂ©venu bien Ă  l'avance du dĂ©cĂšs de Jean-Paul Belmondo © DIDIER SABARDIN 7/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo "Et puis, le 6 septembre, Paul Belmondo m'a envoyĂ© un message. Il voulait prĂ©venir Alain avant l'annonce" © DIDIER SABARDIN 8/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo L'homme explique Ă©galement qu'Alain Delon avait compris qu'il ne reverrait plus son ami, lors de leur dernier rendez-vous © DIDIER SABARDIN 9/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo "Il se doutait qu'il avait vu son copain pour la derniĂšre fois. Les semaines suivantes, il a cherchĂ© Ă  le joindre pour prendre de ses nouvelles" © COADIC GUIREC 10/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo Ce jeudi 9 septembre, Alain Delon sera prĂ©sent lors de l'hommage national rendu Ă  Jean-Paul Belmondo, aux Invalides Ă  Paris © Giancarlo Gorassini 11/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo Il sera accompagnĂ© de nombreuses cĂ©lĂ©britĂ©s comme, Guillaume Canet, Philippe Lellouche, Albert Dupontel... © Giancarlo Gorassini 12/12 - Alain Delon et Jean-Paul Belmondo 1 000 anonymes pourront Ă©galement assister Ă  la cĂ©rĂ©monie

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